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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mercredi 24 juin 2009

Pudique rime avec merdique

Je me suis toujours profondément ennuyé en compagnie de personnes asexuelles. Il y en a qui croient que le sexe est incompatible avec le sérieux, alors que pourtant, c'est ce que l'homme prend le plus au sérieux (ah, la jouissance, quelle affaire!). Je ne me suis jamais privé d'aborder le sujet de la sexualité lorsque je croyais qu'il fallait en parler; cependant, dans une réunion de complets-cravates, ça fait des remous. Cela dénote l'hypocrisie inhérente à cet accoutrement conformiste et moutonnier, et de plus, souvent sans goût (car on s'habille de préférence chez Moore's; autrement dit, on ne s'habille pas du tout).

J'ai connu quelqu'un qui ne portait que des complets-cravates pour venir à ses cours à l'université. Un jour il a compris qu'il avait l'air coincé, alors il mit son uniforme de côté, pour porter un autre uniforme : une chemise satinée à motifs hawaïens déboutonnée jusqu'au nombril, qui laissait voir la petite touffe de shaggy qu'il avait sur la poitrine. Il se croyait cool; le problème c'est qu'il a porté la même chemise pendant au moins 3 ans. J'ai compris que s'il faisait cela, c'était tout simplement parce qu'il ne savait pas comment s'habiller. Les jeunes que nous forçons à porter l'uniforme à l'école aujourd'hui, seront demain dans la même situation. Imposer l'uniforme aux jeunes, c'est encore une de ces mesures à la con qui ne règlent les problèmes qu'en surface. En réalité, le vrai problème, c'est que la société est dépassée par l'ouverture précoce des jeunes. La religion n'est plus là pour briguer leur esprit, et sa disparition a laissé un vide moral : nous ne savons plus quoi faire.

Il y a de même des personnes qui se disent ouvertes, et qui sont en réalité pudiques à mort. Ceux-là, ce sont les pires des coincés. Je crois que la sexualité est une dimension essentielle de la vie, qui nous permet d'être, de communiquer, de communier. Le sexe c'est ludique, c'est un jeu; on ne fait pas l'amour avec sérieux. Je ne dirai pas que le sexe est la clé de tout, de l'éveil, de la paix, et même pourquoi pas, de la conscience (on est tellement dans le Nouvel-Âge avec ce mot) ou de l'intelligence (!), je ne serai pas reichien, car nous sommes tous des disciples de Reich sans le savoir (l'obsession de l'orgasme!) : nous avons un amas d'abrutis qui baisent tous les jours, et ça ne change rien à leur foutue vie.

L'érotisme c'est se laisser être, et laisser être l'autre. Les cours sur la sexualité qui sont donnés à l'école sont des cours de plomberie, pour de futurs plombiers du sexe, comme on en trouve dans les films pornos. Or les jeunes d'aujourd'hui se comportent en blasés face à la sexualité, alors qu'ils n'ont même pas encore joué à touche-pipi. Comme je le disais plus haut, il y a une ouverture précoce des jeunes, mais cette ouverture se fait sur la plomberie, pas sur l'érotisme, ni sur l'autre, ni sur la communion, et encore moins sur soi-même. L'ouverture se fait sur la performance sexuelle et la mécanique sexuelle, et la vraie sexualité, qui implique le désir, est rayée, censurée. Un authentique cri de jouissance ferait crochir les oreilles pudibondes de n'importe lequel de ces profs d'éducation sexuelle.

Nous avons trouvé le moyen de parler de sexe à qui mieux mieux et de montrer partout que nous sommes ouverts, éveillés sexuellement (informés surtout), et de faire des films pornos en quantité industrielle, sans sexe! Faut le faire! Grâce à Playboy, nous avons maintenant partout du sexe propre; nous avons définitivement réussi à stériliser le sexe, que nous avons toujours cru sale.

Je vous soumets le paradoxe suivant : un corps nu n'est pas nu. Ce qui manque au corps nu pour être nu, c'est le désir.

Regardez les revues médicales : pourquoi mon oeil passe-t-il par-dessus le corps nu que j'y vois, alors que le même corps dans une revue porno suscite mon attention? C'est parce que ce corps est perçu dans un contexte médical, et qu'il est désinvesti par moi, automatiquement, de tout désir. La chair n'est plus charnelle dans ce contexte, elle devient objet d'un examen médical froid et rationnel, et pourtant c'est le même corps! Pourquoi un corps nu dans une revue porno est-il traumatisant, et que le même corps dans une revue médicale ne l'est pas (et que l'enfant peut donc le regarder en toute sécurité)? - Parce que la nudité n'est pas traumatisante en elle-même, c'est le désir qui l'est!

Dans notre petite histoire de monogamie mentale que nous nous contons, le désir est tabou!

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