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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

samedi 28 mai 2022

Et si c'était vrai...

Depuis le premier jour que j'écris dans ce journal, j'expérimente des «possibilités», j'expérimente les extrêmes, de même que le contrefactuel (voir à ce propos Dialogues de sourds de Marc Angenot). Par exemple, si l'affirmation que «le but de l'humanité est de se détruire entièrement par les bombes atomiques» était vraie, il s'ensuivrait très probablement un énorme chamboulement de tout ce que nous avons cru jusqu'ici. Ce «chamboulement» est extrêmement stimulant, il nous réveille, nous brasse, comme on dit, même si cette affirmation est très peu plausible, on peut en tirer plein de conséquences nouvelles. L'important, en explorant les extrêmes, est d'arriver à trouver à peu près où pourrait se situer la vérité, ou le plus plausible, qui est probablement quelque part entre les extrémités, au milieu. Pour trouver le milieu, il faut donc progressivement «éliminer».

J'évite d'y écrire des articles «sérieux», structurés, officiels, avec citations à l'appui. Car ceux-là sont difficiles et ennuyants autant à écrire qu'à lire, et que je préfère développer ici mon côté créatif et artistique. Bref, je préfère suivre mon inspiration et m'amuser en toute liberté, en réservant les articles «sérieux» pour d'autres occasions où j'aurai à faire mes «preuves» en quelque sorte. Je m'exerce et je conserve donc mes énergies pour les occasions spéciales, qui m'intéressent peu d'ailleurs, étant encore saturé des travaux de philosophie que j'étais obligé de faire à l'université, dans lesquels je ne me sentais pas libre et où je sentais aussi que je n'utilisais pas mon plein potentiel.

Je joue en quelque sorte un personnage qui ne croit pas nécessairement à tout ce qu'il écrit, un peu comme l'avocat du diable, car il est possible que tout ce à quoi nous avons toujours cru soit, pour finir, totalement «faux» ou erroné. Nous n'avons, la plupart du temps, aucune preuve «solide» de ce que nous avançons. Nous avançons à tâtons avec les affirmations cardinales de notre vie. Nous devons explorer des pistes, parfois des pistes de l'extrême, qui pour ma part, m'excitent et me stimulent énormément. C'est ce qui me fait le plus plaisir. Je ne crois qu'à ce qui a été écrit dans une certaine joie, un certain risque, même si le propos est négatif, ce qui compte davantage parfois, c'est qu'il soit outrageusement négatif, l'exagération fait découvrir la bonne mesure.

J'ai la plupart du temps écrit sous pseudonyme, et j'ai souvent hésité là-dessus, cependant selon l'introduction des oeuvres complètes de Borges aux éditions de la Pléiade, celui-ci a toujours proclamé qu'«il faut tendre à l'anonymat, et que ce que l'on écrit est vain, si l'on n'est pas anonyme». J'ai toujours senti cette vérité, mais j'étais aussi tiraillé par d'autres valeurs comme la «reconnaissance». Aujourd'hui, alors qu'il est clair que je n'en aurai jamais, ayant semé mon lectorat en changeant périodiquement d'adresse web, mon choix est donc fait de continuer à écrire anonymement et de rester libre de dire ce que je veux, malgré les malentendus, qui seront sans conséquence dans la vie réelle. Le désavantage d'avoir trop de lecteurs est qu'ils finissent par faire «dévier» mon écriture. Aussi, je finis par m'enfermer dans un style, une «pose» littéraire, un «rôle», que je déteste. Je n'ai pas envie d'écrire ce qui convient à mon auditoire, mais ce qui me convient à moi. En ce sens, je suis sauvage. Le choix de ce que j'écris, et comment je l'écris, ne concerne personne. Je tiens à cette liberté, souvent oubliée par ceux qui commencent à écrire.

J'ai expérimenté aussi plusieurs personnages au fil du temps. Le journal a plusieurs fonctions.

Il permet d'abord de m'exprimer par écrit, de pratiquer l'écriture, de me garder en forme au niveau de l'expression et de la langue française, qui on le sait, n'est pas facile.

Il permet d'expérimenter des argumentations, et par le fait même, de jongler et de m'amuser avec diverses possibilités.

Ce que je découvre en faisant cela, c'est que la plupart du temps, il n'y a pas de fondement objectif à ce que nous croyons, mais plutôt une façon de sentir, et de ressentir les choses, les «vérités».

Il y a des idées qui nous angoissent, d'autres qui nous rassurent, nous confortent. Il y a aussi la question de la «cohésion» de nos croyances. Par exemple, si je suis pacifiste, je suis contre la guerre, mais il y a aussi de fortes chances que je sois aussi contre la peine de mort, et par la suite, peut-être contre l'emprisonnement. Je pourrais justifier de différentes façons ces partis pris. Elles seront toutes «non-objectives».

Il est commode de dire que Dieu existe et qu'il y a un sens à la vie, mais si j'accepte cette affirmation, je dois aussi trouver des raisons qui expliquent le mal en ce monde. C'est un peu embarrassant. Il reste que cette croyance est autant improuvable que l'affirmation contraire, à savoir que Dieu n'existe pas et que la vie est absurde. Qu'est-ce qui motivera mon choix, ma réponse?

Il reste toujours que mon choix «premier» me forcera à faire d'autres choix qui vont dans le sens de ce premier choix. C'est ainsi que je me constitue un petit univers mental cohérent, formé de «valeurs».

Il est amusant d'analyser comment nous faisons ces choses instinctivement, presque comme des machines, nous donnant un côté «rigide», mécanique. Nous devons en prendre conscience, pour ne plus être «mécaniques» (voir Récits de Belzébuth à son petit-fils de Gurdjieff). Oui, nous sommes fourvoyés par notre mental, par tout ce qui se fait «automatiquement» en nous.

C'est de cette façon que nous nous retrouvons fréquemment dans ce qu'on appelle des «dialogues de sourds». Nous avons alors des systèmes plus ou moins cohérents de valeurs qui s'opposent, fondés sur des façons de sentir, de ressentir et de voir les choses qui sont irrémédiablement inconciliables. Nous sentons où il y a «justice» et où il y a «injustice». D'autres aussi, peut-être plus sensibles à certains «faits», peuvent nous aider à percevoir certaines injustices, et nous inciter à faire certains choix, si nous sommes réceptifs à leurs arguments.

Bref, j'avance des idées, des affirmations, qui sont souvent osées: est-ce que les riches nous oppriment vraiment? On peut se prononcer dans un sens comme dans l'autre. Si on est pauvre, on risque d'être d'accord avec cette affirmation; si on est de la classe moyenne, on risque de balancer entre différentes opinions «conciliantes»; si on est riche, on ne sera évidemment pas d'accord.

Est-ce qu'il faut voter, ou est-il préférable de ne pas voter, et quand? Est-ce que les partis politiques peuvent amener de grands changements dans la société? Qu'est-ce que la démocratie? Existe-t-elle vraiment, ou n'est-elle qu'un vain mot, qu'un idéal à jamais inatteignable? Est-elle préférable à d'autres formes de gouvernement, et pourquoi? 

Est-il préférable de croire ou de ne pas croire? Qu'avons-nous pour appuyer notre croyance, ou notre athéisme? Qu'est-ce que la «justice»? Nous sentons qu'emprisonner un meurtrier n'est pas complètement «juste», mais quelle serait l'alternative? De renverser le mal qui a été causé et de l'empêcher de se reproduire, mais comment?

Est-ce que la technologie est intrinsèquement bonne, ou est-elle plutôt l'oeuvre du «diable»? Y a-t-il quelque chose de profondément «vicié» dans l'éducation que nous dispensons, du primaire à l'université? Le monde est-il condamné en bloc, ou certains individus particuliers ont-ils une chance de s'en sortir en faisant certains efforts conscients?

Toutes ces questions peuvent être posées en principe. Elles nous amènent à nous découvrir, à comprendre mieux le monde, à comprendre ce qui ne va pas, et à se comprendre mieux soi-même.

C'est pourquoi j'écris.

vendredi 27 mai 2022

Le vrai visage de la politique

Je déteste l'Autre

De tout côté que je me tourne, l'Autre est là. Il se mêle de mes affaires, il me dit quoi faire, il me contrôle, me juge, me catégorise dans ses petites cases, sa grille de merde, il m'enterre avec ses sophismes à la chaîne, il parle fort, il est con, il me fait chier. Nous avons des réflexes de troupeau: dès qu'on aime, on pense en terme de mariage, sans se rendre compte qu'on fait entrer l'État, les juges et les avocats dans notre relation, comme si c'était des garanties pour qu'un sentiment dure. On devrait toujours commencer un mariage par la fin, ça nous couperait peut-être l'élan. Sa nature marchande deviendrait claire.

Je n'ai jamais aimé l'Autre. Appelez-le comme vous voulez: gouvernement, société, mon voisin, c'est un peu du pareil au même. Ne pensez pas libérer un peuple sous la dictature: la dictature, c'est le peuple qui la veut. Si on prend les individus un à un sous une dictature, on trouvera un petit dictateur en chacun. Ne plaignez pas la Russie, ni la Corée, ni la Chine, ne plaignez pas les Américains pour leur ploutocratie ou leur violence armée. Leur soumission devant l'argent et les armes est au coeur de chacun d'eux. Dans un logique d'argent, il n'y a aucun moyen de sortir de l'oppression financière par les riches que de faire toujours plus d'argent. Dans une logique d'armes, il n'y a aucun moyen de se protéger des armes des autres qu'en en ayant une soi-même.

On pourra chialer autant comme autant contre un gouvernement, il ne sera toujours pas mieux que la somme des mentalités d'un pays donné. Les êtres d'exception n'auront jamais voix au chapitre. C'est radicalement impossible. C'est pourquoi il ne sert à rien de voter ou d'avoir de quelconques projets politiques un tant soit peu brillants.

Je démissionne de la société. Je démissionne du monde. Je démissionne d'aider quiconque en quoi que ce soit. Toute la religion est de la foutaise. C'est une invention de l'esprit afin de s'auto-tranquilliser devant le néant que nous sommes. Il n'y a jamais eu de Dieu, ni de prophètes, ni rien de sacré. La Bible est tout entière sortie de la tête des hommes. C'est pure divagation d'illuminés, de fanatiques, de malades mentaux. Le «crime» est pure convention. Un soldat en tue un autre, c'est un «héros», on l'acclame, on lui donne des médailles. Un homme en tue un autre, c'est un meurtrier, il est «infâme», on l'emprisonne. C'est simple comme ça: l'habit ou l'uniforme, comme par magie, font toute la différence. Dans un cas, c'est «bon», dans l'autre, c'est «mal». Donc, portez les bons déguisements, sinon vous irez en Enfer.

Les problèmes dans lesquels nous baignons et mijotons quotidiennement comme des cornichons, sont très profonds, insolubles pourrait-on dire. Parce qu'ils sont enracinés en nous, et que nous sommes enracinés en eux, par exemple: l'impasse de l'éducation, de l'État, et de la technologie. Nous ne pouvons nous passer de ceux-ci, mais en même temps, ils nous conduisent à l'abîme avec un sourire. Inversement, vouloir éliminer ces problèmes serait se condamner au suicide. Il n'y a pas moyen de s'en débarrasser, comme un poison qui s'est insinué en nous et auquel nous sommes habitués et maintenant dépendants. Par exemple, nous sommes de plus en plus coincés dans les villes, mais on continue toujours plus de rouler en voiture, qui plus est, avec pour seul passager, le conducteur. On nous badigeonne les oreilles qu'il faut manger sain, mais toute notre nourriture est empoisonnée à la source depuis au moins la révolution «verte» avec les pesticides, et maintenant les OGM. Nous sommes pour l'État, parce qu'il permet de garantir la liberté de tous, mais celui-ci peut nous l'enlever à volonté pour des raisons de «santé publique» bidon. On force les jeunes à étudier aujourd'hui des matières à l'école qui seront obsolètes demain ou pour lesquelles il n'y aura pas ou plus de débouchés. Et généralement, plus on s'approche des «matières culturelles», c'est-à-dire, qui sont bénéfiques pour l'épanouissement de l'individu, mais qui n'ont pas de valeur immédiate pour la société, plus on se condamne à la faim.

Nous ne sommes pas conscients de ce que nous faisons, de ce que nous sommes, et de ce que nous pensons. Mais ce n'est pas très grave, parce que la plupart du temps nous ne faisons rien, nous ne pensons rien, et nous ne sommes rien. Nous nous voyons souvent comme des rouages de rouages de rouages, et dans nos moments d'exaltation, parfois comme des petits Neo venant sauver le monde. Le monde n'est pas à sauver, car il a toujours été perdu d'avance.

S'il y avait un travail à faire, ce serait sur chaque individu pris un à un.

C'est la seule façon de changer quelque chose. De démassifier l'individu.

Au niveau politique, il n'y a rien à faire.

La fin de la politique, ce sont les bombes atomiques.

Voilà le vrai visage de la politique.

dimanche 8 mai 2022

Le Génome-entité

Le Génome humain est une entité mathématique et logique qui cherche à croître, se connaître elle-même, et tout ce qui existe. Nous ne savons pas encore le pourquoi de son action, peut-être un jour le découvrirons-nous. Si deux philosophes se sont approchés de le concevoir, c'est bien Hegel et Spinoza.

Au niveau individuel, nous sommes pour l'instant voués à disparaître avec toutes nos connaissances accumulées tout au long de notre vie. La connaissance est pour nous moyen, pas encore fin en elle-même.

Nous sommes en Dieu, mais il nous est impossible de connaître son intention dernière, son but ou sa logique. Dieu est partout, en nous, hors de nous. 

Nous sommes destinés à mouvoir des planètes, des systèmes solaires, des galaxies, et des ensembles toujours plus vastes à des vitesses infinies. Le système solaire est notre vaisseau temporaire.

Nous pourrons changer la structure de l'univers, et en créer de nouveaux.

Nous pourrons intervenir dans l'infiniment grand, comme dans l'infiniment petit.

Il n'y a aucune loi immuable.

Tout est possible pour le Génome humain.

Mais nous ne savons pourquoi toutes ces possibilités s'offrent à lui, ni pourquoi elles lui viennent graduellement.

C'est Dieu qui se donne à lui-même.

Pour parvenir à ces vérités, la maîtrise de notre esprit est primordiale.

Car c'est là que tout vient à l'être.

Le monde nous apparaît tel que nous le connaissons.

La connaissance est un jeu divin.

L'Art est sa demeure.

lundi 2 mai 2022

Vibrer

Étonnamment, si on me demandait: quel est l'album préféré de ta vie? Je ne saurais que répondre, et pourtant. J'en connais qui doivent le savoir très bien, de la façon dont ils parlent de la musique. Mais pour ma part, malgré que la musique soit essentielle dans ma vie, qu'elle représente un grand plaisir et une grande inspiration, que j'en consomme en grande quantité, et depuis toujours, je ne suis pas capable, heureusement ou malheureusement, d'écouter le même album plus qu'un certain nombre de fois déterminé. Ne me demandez pas de réécouter des albums de ma vingtaine, trentaine ou quarantaine: il n'y a rien de plus ennuyant. Tous mes «excellents albums» ont toujours fini dans un coin ou aux poubelles, pour ne plus jamais être écoutés.

J'ai besoin tous les jours de découvrir de la nouvelle musique, surtout de nouveaux sons et de nouveaux styles, le plus possible originaux. J'ai un appétit de musique, comme j'ai un appétit de lecture. Je juge en un clin d'oeil si une chanson est bonne, moyenne ou mauvaise. Je suis capable de découvrir de petits chefs-d'oeuvre dans tous les genres, du classique au death metal. 

La clé est dans le concept. Une oeuvre qui va dans tous les sens est déconcertante. 

Par exemple, j'écoute parfois du death metal, et j'aime parfois le country, mais si demain Fear Factory se mettait à jouer du country, je penserais qu'ils sont devenus fous. Par contre, les albums Joshua Tree et Achtung Baby du groupe U2, bien que se suivant, sont très différents, mais des chefs-d'oeuvre dans leur genre respectif. De même pour les albums The Downward Spiral et With Teeth de Nine Inch Nails. Cependant, bien que je fasse l'éloge de ces albums, je ne peux les réécouter et rééprouver ce que j'en ai éprouvé lors des premières écoutes, car tout cela est ancré dans un monde maintenant disparu, et qui surtout, ne me parle plus.

Si un concept guide l'album, ce sera probablement un bon album. La plupart du temps, le manque d'unité dans une création artistique est dû à un manque de vision, à un manque de connexion avec l'intérieur. La diversité est possible, mais à l'intérieur de l'unité, comme s'il y avait jeu. Il faut ressentir au plus profond de soi ce que l'on veut exprimer. Il faut naître à soi-même. L'art véritable mise le tout pour le tout. L'art doit prendre place dans une histoire, un narratif, comme une basse continue, car la vie est une telle histoire, un peu sans le vouloir. La vie est art, et l'art est vie.

Lorsque j'écoute une bonne chanson, mon impression générale est qu'une nouvelle dimension s'ouvre à moi, dans laquelle j'entre, et dans laquelle je suis touché. Cette chanson créée en moi des émotions, et je l'investis à mon tour d'émotions, comme si j'avais une émotion d'émotion. On est joyeux d'être joyeux, et triste d'être triste. Mais il est aussi possible d'être joyeux d'être triste, et triste d'être joyeux, comme la femme tout juste laissée se trouvant à une fête peut y être joyeuse et triste à la fois, sa tristesse édifiant sa joie, sa joie creusant sa tristesse, joyeuse mais triste de n'y pouvoir l'être, à jamais, avec son amoureux. Nous vivons dans le temps, les émotions sont dynamiques et parfois paradoxales. 

J'écoute plusieurs fois une chanson, jusqu'à ce que se dissipe ce qu'elle me fait ressentir. Parfois, le processus peut se dérouler par intervalles sur plusieurs mois, ou même plus d'une année, mais ce qu'elle me fait ressentir se dissipe à chaque fois toujours davantage, c'est immanquable. C'est frustrant de dire un jour que c'est la «chanson de ma vie», d'en parler à tout le monde, et quelques jours après, de l'avoir oubliée, et d'être passé à autre chose... C'est la même chose pour les films.

J'ai toujours trouvé ça normal, mais ça ne l'est pas. La plupart des gens semblent n'avoir aucun problème à réécouter la même musique et revoir les mêmes films. Je ne sais pourquoi je suis ainsi, et bien que ce pourrait être un sujet d'intérêt, cela m'importe moins que de

Vibrer