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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

vendredi 31 juillet 2009

Darkside

Oui, j'ai un côté sombre, j'ai un côté lètte, derrière ma belle gueule se cache des fonds de bars l'hiver enfoncé dans la dépression, les peines d'amour, le broyage profond du soi et de tout ce qui vient avec : la bìère, des tonnes, noyé sous la bière, cale, cale, appuyé contre le comptoir, une beauté distante, inatteignable, la romance d'un soir, fumée de cigarette, dans ta bouche, dans ma bouche, donne-moi tout, donne-moi ta bouche, ton ventre, ton sexe. Amour, amour, je te bois, je te sens, tu es là. Danse, danse, prends-moi, je te prends, je t'aime hiver, un baiser, le givre, blottie contre toi, chambre obscure, je renais avec toi, sans toi.

mercredi 29 juillet 2009

Le poids du passé

J'ai vécu beaucoup de choses difficiles dans ma vie, comme nombre d'entre vous. Ces épreuves resteront à jamais gravées dans ma mémoire, mais elles ne sont plus présentes dans ma vie, je ne les veux plus, je ne veux plus du poids du passé, de sa négativité. J'ai subi un long cheminement qui m'a amené à me reconstruire moi-même, à me sortir de mes émotions négatives, destructives, et qui m'a forcé à regarder vers l'avant, vers le meilleur, et à vouloir de nouveau, pour moi, pour la vie, pour mon bonheur et ma liberté.

Je devais tout changer, pas seulement mon environnement. Mais la volonté, alors qu'elle semblait morte, devait renaître, revenir à la vie, et pour cela je devais marcher sur les bords du gouffre. Entouré de négatif, de misère, de suicides, de violence, d'abandon, de surdoses, de peine, je devais trouver de l'air pour pouvoir continuer à respirer. Personne ne pouvait m'aider, j'étais enfermé dans mon propre enfer sans possibilité d'en sortir, car j'étais anéanti de l'intérieur, je n'existais plus, j'étais rayé de la carte : je m'étais rayé moi-même, dans la drogue jusqu'au cou.

À travers ces épreuves, ma volonté semblait s'être éteinte, endormie, mais elle ne s'en alla jamais complètement, car je n'aurais jamais eu les capacités pour pouvoir consommer autant. J'étais efficace à me détruire, autant que je l'étais au cégep à résoudre des intégrales. Le jour où j'ai vu clairement que la folie ou la mort n'étaient plus loin, j'ai rêvé de mieux, j'ai rêvé d'un avenir. J'ai rêvé d'une nouvelle vie.

Aujourd'hui je suis bien, libre, en santé physiquement et mentalement, j'ai réussi à me débarrasser seul de ce qui me retenait en arrière : mon ressentiment, mes rancunes, que je retournais contre moi-même, pour m'écraser au sol, dans la boue. Aujourd'hui je vole en hauteur, je surplombe, je vis avec la lumière, j'avance rapidement, je ne suis plus le même homme : je me suis créé moi-même, de pied en cap. La vie heureuse est possible, en devenant léger, en se débarrassant radicalement de ce qui sape notre énergie, de ce qui nous empêche d'avancer, de nous dépasser nous-même toujours vers le meilleur, vers la réalisation de ce qui nous est le plus cher : la réalisation de nos rêves, au lieu de contempler notre future tombe.

lundi 27 juillet 2009

L'Internet tue

On se trouve intéressants, on tape au clavier, on veut en apprendre plus, et plus, et encore plus... Évidemment, on arrive à un point où il faut se rencontrer, en partie parce qu'on s'est dit les choses les plus personnelles, qu'on s'est plu, et que nous sommes en quelque sorte rendus familiers ou intimes. L'Internet peut nous permettre de nous faire voir à l'autre par un trou de serrure, et en lui montrant seulement nos beaux côtés, ou encore en agissant d'une façon qui n'est pas représentative de nous-même, en bien ou en mal. C'est un peu comme une relation par lettres, ou aujourd'hui, par courriels : tout est brossé, enjolivé, étudié, on ne s'exprime pas comme on s'exprimerait habituellement, tout prend une allure chevaleresque et romantique, ou encore caricaturale, bref, d'une façon ou d'une autre on se conte des histoires et on a le temps de se reprendre et de se travailler. C'est très statique et très trompeur.

On se serre la main ou on s'embrasse, nous ne nous connaissons pas, mais étrangement c'est comme si on se connaissait déjà puisqu'on sait tout l'un sur l'autre : on n'a donc rien de nouveau à se dire. La situation est embarrassante, et si je feins d'ignorer ce que je sais déjà pour alimenter la discussion, j'ai l'air de quelqu'un qui ne suivait pas les conversations, et je force l'autre à se répéter, ce qui est gênant et ennuyant pour les deux : bref, une très mauvaise soirée en perspective, garantie, et que ce soit pour l'amitié ou l'amour, c'était déjà mort dans l'oeuf.

Vous pouvez être pratiquement sûr que si vous parlez trop avec une personne qui vous intéresse par Internet, vous ne pourrez jamais, au grand jamais, la rencontrer en personne. La transition est très difficile du virtuel à la réalité, et souvent pas mal plus raide qu'on pense. «Ce qu'une personne est, parle plus fort que ce qu'elle dit» n'a jamais été aussi vrai, et pour confirmer l'adage la présence physique est indispensable.

Pour aller un peu plus loin et montrer à quel point les rencontres par Internet vont totalement contre le sens naturel des choses, imaginons que je demande à voir plus de photos d'une personne de façon à me faire une idée de son apparence afin de savoir si elle me plaît physiquement. À l'instant même où je fais la demande, je suis dans la position de voyeur, et aussi du gars qui cherche de la peau, selon le point de vue de l'autre personne. L'autre est réifié, transformé en chose que j'observe froidement à distance et la rencontre prend automatiquement, mais peut-être faussement, une tournure de relation de cul potentielle. On pourra accuser les gens qui demandent plus de photos d'accorder beaucoup trop d'importance aux apparences et d'être superficiels. Cependant, que faisons-nous tous les jours lorsque nous croisons de belles personnes sur la rue ou ailleurs? - nous jugeons en partant selon l'apparence physique, et nous décidons à partir de plusieurs critères d'apparence physique si nous allons aborder cette personne ou non sans n'avoir d'abord rien demandé à l'autre : c'est beaucoup plus d'«images» que de simples photos, et d'emblée, au simple regard, en quelques secondes, nous avons jugé la personne, nous avons fait une certaine «estimation».

Nous faisons tout cela, hommes ou femmes, sans nous en rendre vraiment compte. Nous ne nous rendons pas compte que le physique est d'abord une invite, de façon instinctuelle, à connaître davantage l'autre personne. Le problème avec l'Internet, c'est que ce comportement naturel et hautement «dynamique» devient analytique et est décortiqué en étapes partielles qui deviennent «objectives», «statiques» et surtout, conscientes, ce qui révèle son côté simplement «intéressé» tuant le charme alors que dans la réalité le processus reste caché, se fait en un instant et est pratiquement automatique. On s'accuse de n'être intéressés que par le cul parce qu'on regarde des photos, mais on fait bien pire dans la réalité. La réalité, c'est que le «physique» on n'en sort pas, et qu'on le veuille ou non, ça passe toujours en premier... avant d'aller plus loin, bien sûr. Et pour ceux ou celles qui physiquement, ne se trouvent pas au poil, le charme qui émane d'une personne permet de faire beaucoup de concessions. Bref, le clavier me fait penser à une femme qui me dit «Je veux te séduire»! Le problème, c'est que la séduction ça ne fonctionne pas comme ça et que cet instrument froid hautement technologique qu'est l'ordinateur ne pourra jamais arriver à faire passer l'essentiel, qui dépasse de loin l'écriture, entre deux êtres de chair et d'émotions.

Le mercurien : pas facile à dompter, mais assez drôle























dimanche 26 juillet 2009

Questionnaire d'usage 2

Je ne crois pas à l'astrologie, mais chaque fois que je tombe sur un de ces livres, n'importe lequel, et que je lis sur mon signe, je me reconnais à tout coup. Je dirais que dans toute la masse d'informations, la description de mon signe, la Vièrge, est à 95% exacte. Même si je ne crois pas à l'astrologie comme telle, je dois admettre que je corresponds à un type de personne bien défini, et que je n'arrive pas à l'expliquer. En revanche, j'ai connu des personnes de mon signe qui ne correspondaient pas à sa description, c'est pourquoi je préfère dire que je suis mercurien en tenant compte plus ou moins des dates de naissance.

1.Aimez-vous faire de nouvelles rencontres? - Je suis très sociable et suis toujours prêt à engager le dialogue avec autrui pour le simple plaisir de communiquer, cependant, je peux être très tranchant avec les personnes qui ne m'intéressent pas du tout et je déteste le blabla pour ne rien dire. J'aime apprendre de mon interlocuteur mais j'aime aussi apprendre de mes livres, c'est pourquoi j'adore la solitude et que j'ai très peu de patience avec les gens qui manquent d'assurance. Je suis sans pitié envers les éternels hésitants, que je traite comme des sous-merdes.

2.Mon degré de distance par rapport aux choses? - Le propre du philosophe ce n'était pas, selon moi, l'étonnement (Aristote), mais le détachement. Je n'ai jamais réussi à coller à quoi que ce soit, parfois même, à mon grand désarroi. Je n'ai jamais trouvé la réponse à «qui» je suis : un être à facettes multiples, selon mon type : c'est effectivement le cas. I am the «No Name» man. Je me vois comme un type «militaire» au niveau de la pensée : conquêtes intellectuelles. Je n'ai jamais autant de plaisir à parler avec une femme intelligente et sensible.

3.Sens de l'humour? - Bien à moi, un peu moqueur, noir, cynique; j'aime bien les jeux de mots et l'autodérision. L'«esprit de sérieux» est mon ennemi mortel, d'un ennui mortel. Je déteste ce qui est figé, les «certitudes». Je vise en général à tout faire sauter, dans tous les domaines.

4.Sens pratique? - Aucun crisse de sens pratique. Rien ne me tape plus sur les nerfs que d'avoir à réparer quelque chose. En revanche, j'ai un sens pratique en «théorie».

5.Vos lectures? - J'ai une insatiable curiosité qui m'incite à multiplier les centres d’intérêt. Je lis beaucoup, et feuillette énormément. Un livre m'attire plus souvent qu'une femme, qui, même très belle, ne gagne pas la plupart du temps, comme bien d'autres personnes, à être connue de plus près. La beauté corporelle m'exaspère lorsque la vivacité d'esprit est absente.

6.Films? - Pratiquement tous les films me tapent sur les nerfs, je n'en écoute que rarement, et quand c'est le cas, de bons films d'horreur ou des documentaires.

7.Caractère? - Je ne supporte pas l'autorité et qu'on me dise quoi faire. Je fais ce que je veux, et je suis très sauvage lorsque je sens qu'on empiète sur ma liberté. À part ça, je suis un homme très doux et très aimable si on sait comment s'y prendre avec moi. Aussi, si j'étais trop facile, mon nom ne serait pas «Mâle Commode» : je ne joue pas un personnage.

8.Télévision? - Rarement, mais quand c'est le cas, les combats extrêmes, les combats de boxe importants, les documentaires, «Comment c'est fait?», les poursuites policières et les enquêtes policières réelles, ainsi que les émissions sur l'histoire. Je ne cherche jamais à me «divertir». Pour moi, me «divertir», c'est apprendre quelque chose. Quand j'apprends, je suis heureux. Ma soif de connaissances est envahissante, et je ne suis pas facile à vivre précisément pour cette raison : souvent, je ne m'endure même pas moi-même, parce que je me pousse à bout de force comme si j'étais une machine et qu'il arrive que les commandes ne répondent plus, à ma grande frustration.

9.As-tu du temps à perdre? - Seulement lorsqu'il me sert à quelque chose.

10.Ton défaut principal - Mon esprit critique pratiquement «compulsif», ce crisse-là, détruit toute possibilité de vie sociale régulière. Je fais un grand effort pour être plus «diplomate», mais croyez-moi, c'est très difficile d'enlever mes «grosses bottes diplomatiques».

samedi 25 juillet 2009

Désintoxe

J'ai fait une petite rencontre au gym, un gars qui m'a parlé de ses combats extrêmes, ça m'a rappelé le temps où moi-même je faisais de la boxe et étais top shape. Je me suis senti tout d'un coup un peu pépère, pas en forme pantoute, et j'en ai perdu beaucoup depuis ma noyade dans l'alcool des derniers mois à cause d'un job vraiment frustrant que je devais endurer pour survivre. J'ai repris le poids que j'avais perdu, perdu mon cardio et ma vivacité, bref, je ne me reconnais plus de sur les photos d'il y a à peine une année. J'ai perdu l'étincelle, le brillant; tout s'est émoussé et je suis devenu très négatif; je me suis enfermé dans le monde virtuel, tout en étant incapable de nouer des amitiés. Je me suis condamné à rester dans ma merde par ma négativité.

J'ai décidé de changer tout ça. Je me sens beaucoup mieux après l'entraînement physique, que je devrais faire 4 fois semaine au lieu de toujours vouloir me surmener intellectuellement et me forcer à rester assis en exerçant une contention d'esprit constante et inutile, puisque je comprends les choses toujours plus vite et plus facilement après une bonne course qu'après trois cafés qui viennent à me foutre de toute façon les nerfs en pelote. J'ai décidé aussi de changer d'attitude et d'être moins critique, plus positif et de penser aux autres au sens d'une équipe avec laquelle je dois travailler.

En tout cas pour l'instant, même si ça ne fait que quelques heures, le changement est déjà spectaculaire et qualitatif. C'est comme si l'énergie et un paquet d'idées constructives avaient débloqué d'un seul coup. Après tant d'années de niaisage, de tournage en rond, de rumination, de masochisme et de négativité, je suis prêt à passer, avec tout mon bagage d'expérience et de connaissances, au niveau supérieur. Je vais faire attention à ma santé et je vais tirer le maximum de moi-même. N'empêche qu'un bon coup de chialage, ça fait aussi du bien des fois! On va garder ça au strict minimum, et pour un autre blogue que vous connaissez peut-être déjà.

Une vie d'hormones

Hier, je m'ennuyais royalement dans le bus et je regardais les filles rentrer en feignant de lire mon livre, plusieurs étaient belles, c'est pas le choix qui manque en été, et je me disais : «Pourrais-je vraiment m'empêcher de bander devant une de ces filles si elle faisait devant moi, nue, le grand écart?» Ben non justement, les hormones c'est automatique, ça fait lever tout de suite la mécanique parce que mes petits spermatozoïdes, ces courageux conquérants, ont soif d'un bel ovule sexé, même si je n'en ai aucune envie. Et là je pensais à un personnage de Kundera, Tomas je crois, dans L'insoutenable légèreté de l'être qui se plaignait qu'il avait sacrifié plein de baises possibles pour une seule femme qui au bout de quelques années le sacre là. Je me disais : «Les deux font plein de sacrifices de baises, à quoi ça rime?» Soit on se ramasse pépère, soit on se ramasse Casanova. Il n'y a pas de milieu semble-t-il, si on ne veut pas être obligé de mentir et de faire du mal. Pourquoi continuons-nous à nous comporter comme des couples sérieux qui veulent fonder une famille et pour qui la monogamie serait avantageuse, alors que la plupart du temps nous ne voulons faire que l'amour et que nous n'en avons rien à foutre de la marmaille? Pourrions-nous prendre l'amour plus à la légère et arrêter de nous en faire croire ou de vouloir en imposer aux autres?

jeudi 23 juillet 2009

Cumshot

Quand on sait que tout fout le camp et qu'il n'y a rien à faire à part danser lascivement en faisant une face cochonne et en se tapant les fesses de façon idiote pour faire affluer les mouches et la dèche des quatre coins du monde, on sourit discrètement en se disant que ce monde-là va l'avoir sa volée. Quand le béton commence à s'égrener à cause des décibels d'un groupe rock, on sort du bâtiment pour se préparer au spectacle de son effondrement sur la masse fascinée. Pause pénis, gros plan, cumshot, 3000 chaudières de sang giclant des corps écrapoutis.

mercredi 22 juillet 2009

On my way to the fucking top

Je suis assez écoeuré merci de la navette spatiale. On en sort pu d'la navette, elle est partout, étalée sur tous les postes de TV, tous les journaux, ça n'en finit plus, ça n'en finit jamais, ça n'en finira jamais. Chu pris dans la chevelure de Payette sur la navette, chu mêlé dedans, je vois rouge crisse. J'm'en câlisse de l'espace, mais ils nous en foutent plein la gueule. En plus, l'autre coco qui s'en va se payer un trip de riche dans la navette : au lieu de garrocher son argent dans l'espace, ne pourrait-il pas en garrocher plus dans des causes sociales? On va me répondre : «il le fait déjà.» Ma réponse c'est : «c'est pas assez, c'est jamais assez lorsqu'on parle de vies humaines broyées par l'injustice qui règne en maître sur cette planète.» Occupez-vous donc de la Terre au lieu de vous occuper de l'«espace» bande de gros cocos.

lundi 20 juillet 2009

Le bonheur est dans la crowbar

Pratiquement tous les produits que nous achetons sont faits à la sueur du front de travailleurs qui gagnent un dollar ou deux par jour, parfois quelques cent; en Chine, certains travailleurs reçoivent 13 cents pour une journée de travail de 16 heures consécutives 6 ou 7 jours par semaine, au lieu des supposés 87 cent, ce qui leur permettrait au moins de se soigner et d'envoyer un peu d'argent à leur famille, et doivent même parfois coucher sous leur machine pour reprendre tôt le lendemain des journées de travail qui s'étendent de 7h à 22h, et parfois même dans les périodes de pointe, jusqu'à 2h du matin et souvent de façon répétée, ce qui conduit directement à l'épuisement des travailleurs et à la maladie.

Les industries (surnommées les «hirondelles» par les travailleurs) font affaire avec les ZFI (zone franche industrielle) des pays hôtes et ne paient jamais d'impôts, et lorsqu'ils doivent en payer, ils utilisent toutes sortes de subterfuges pour y échapper, comme fermer et rouvrir sous un autre nom; ils ne participent ainsi jamais à la création d'infrastructures pour l'eau courante, les routes, les services médicaux, l'éclairage des rues, les transports en commun, l'éducation. Les usines sont construites à la va-vite, et parfois on convertit tout simplement une ancienne porcherie en lieu de travail. Aussi, les gouvernements offrent les services d'une armée «à la fois désireuse et capable d'écraser les conflits de travail». À mon avis, ces zones de libre-échange sont des zones de libre écrasement des travailleurs et je ne vois pas beaucoup de différences entre ces conditions de travail et l'esclavage qu'on croit aujourd'hui disparut.

Aux Phillipines, on cadenasse les toilettes pour que les employés y aillent tous en même temps. Ils doivent pointer leur carte de travail et on calcule leur temps d'«improductivité». Conséquence : les couturières qui font notre «beau linge» pissent dans des sacs en plastique sous leur table de travail. Les heures supplémentaires sont la règle, et on offre parfois de petites récompenses, comme des beignes et un stylo(!); aussi une couturière qui était épuisée par les périodes de travail de nuit consécutives et qui souffrait de pneumonie, a demandé un congé pour pouvoir se rétablir sans perdre son emploi : on le lui a refusé et elle est morte de sa pneumonie à l'hôpital. Et la liste s'allonge indéfiniment d'écoeuranteries par-dessus écoeuranteries.

Parfois, je ne sais quoi penser de tout ça. On se demande : pourquoi ne se regroupent-ils pas? Pourquoi ne deviennent-ils pas violents à leur tour? On pourrait être tenté de blâmer les travailleurs qui se laissent exploiter de cette façon et rejeter la faute sur eux. De dire que le développement de la «conscience collective» doit passer par là, par ces souffrances, par ces abus incroyables pour devenir possible. Mais c'est comme blâmer la victime au lieu de l'agresseur : de dire que c'est la faute de la femme battue si elle se fait battre parce qu'elle «tolère» la situation, et que c'est aussi la faute de la femme qui marchait dans une ruelle si elle s'est fait violer, puisqu'elle portait une minijupe «trop» courte, etc. C'est aussi la faute des investisseurs s'ils se sont fait flouer par les Lacroix, les Jones et les Maddox, puisqu'ils leur ont confié leur argent. De même, c'est la faute des animaux dans les cirques s'ils se font battre en cachette à coup de crowbar par des soi-disant «éleveurs», puisqu'ils ne font pas toujours ce qu'on leur demande de faire. En suivant ce raisonnement, c'est aussi la faute des Juifs s'ils se sont laissé parquer dans des trains pour se faire ensuite envoyer dans les chambres à gaz...

On le voit-tu là qu'il y a un osti de problème?

Mon raisonnement est le suivant : on laisse les coudées franches aux entreprises, on a «rien» en retour, seulement de la misère. Les capitalistes n'ont par principe aucune «conscience collective» : ils sont là pour nous exploiter, point à la ligne, et s'ils pouvaient nous transformer en machines ils le feraient. Ils se foutent de nos conditions de vie, de nos droits, des conditions de travail, de nous en tant qu'êtres humains, de la nature, ils se foutent du monde entier, sauf de leur profit personnel.

Ces entreprises comptent sur notre passivité et notre suffisance en tant qu'Occidentaux qui avons tout cuit dans le bec. Nous croyons apporter à ces pays notre «belle technologie» et notre «beau progrès» et que tous leurs problèmes vont se régler tout seul comme par enchantement? Erreur : les sociétés se comportent dans ces pays en touristes économiques plutôt qu'en investisseurs à long terme soucieux d'alimenter une croissance durable et désireux d'améliorer la qualité de vie des gens qu'ils exploitent comme du bétail. Au lieu de se fixer un certain objectif de prospérité commune et d'équité, ils transforment des pays entiers en bidonvilles industriels, compromettent leur système d'éducation et polluent leurs ressources naturelles. Ainsi, en plus de perdre leur vie à travailler pour rien, ils se font voler tout ce qu'ils ont et sont des travailleurs étrangers dans leur propre pays, sans argent et sans abri. Les salaires sont si bas qu'aucune amélioration de la qualité de vie n'est possible, et cet argent ne sert ainsi qu'à renouveler la force de travail, et encore. Manger son bol de riz, payer son transport et retourner travailler parce qu'on n'a plus d'argent, vous appelez ça une vie? Ces gens ne sont pas dans une meilleure situation que les poulets dans les cages destinés avant même la naissance à devenir des croquettes shootées aux stéroïdes. Il y a même des cas où on administre des amphétamines par injection aux employés pour qu'ils produisent plus dans les périodes de pointe.

Est-ce que vous trouvez que ça commence à ressembler à du pillage? Du pillage de vies et de ressources fait en toute impunité? Du pillage comme les Américains ont fait et continue de faire en Irak? Attendez, ça ne fait que commencer. La liste est longue des choses que nous ne savons pas ou sur lesquelles nous préférons fermer les yeux parce que l'agresseur est trop fort ou trop dangereux, ou tout simplement parce que nous croyons qu'il n'est pas possible qu'on veuille faire autant de mal à des gens sans raison. Et pourtant...

Je ne sais quoi penser de tout ça et je me demande si l'homme est vraiment, par nature, méchant. Mais s'il y a des «méchants», il y a nécessairement de «bonnes personnes» qui en sont les victimes. Et c'est pour ces personnes, pour leurs droits et la justice que nous devons lutter, dans ce qui ressemblera fort, semble-t-il, à une «lutte à mort pour la reconnaissance» à la Hegel. En parler aide déjà dans une certaine mesure, car cela montre que nous n'approuvons pas ces prédateurs qui nous rendent la vie infernale par leur inconscience ou ce qui serait plutôt le cas, par leur mépris le plus total.

dimanche 19 juillet 2009

Questionnaire d'usage 1

1.Quel est ton mets préféré? - Les mets italiens en général, mais j'ai un faible pour la lasagne.
2.Ton mannequin préféré? - Elizabeth Hurley : intelligence et élégance.
3.Où te vois-tu dans 5 ans? - En train de lire un bon livre couché dans mon lit (entouré de poules, dont au moins un clone d'Elizabeth?).
4.Les langues que tu aimerais apprendre? - Le grec ancien, le chinois, l'allemand.
5.Ton romancier préféré? - Si je me fie à la majorité dans ma bibliothèque : Thomas Bernhard.
6.Quels sont tes études? - Je suis très polyvalent, mais j'ai une attirance immodérée pour la philosophie.
7.Ta science préférée? - La mathématique.
8.Mes livres de prédilection? - Très peu de romans, mais beaucoup de livres qui pourront m'instruire. Je suis très curieux et j'adore la recherche.
9.Trait de caractère particulier? - Je ne ris pratiquement jamais, à part un petit sourire en coin, j'aime mieux faire rire les autres, c'est moins forçant. Je crois qu'on appelle ça le «sarcasme».
10.Ton ambition principale? - J'ai appris qu'il ne servait souvent à rien de vouloir quelque chose directement. Le secret est de ne pas trop vouloir.
11. Tes projets de vie? - Développer une vision globale du monde et travailler pour la justice et l'éthique.
12.Ton voeu le plus cher? - Qu'il y ait une vie après la mort, qu'il y ait un sens.
13.Mon rêve le plus fou? - Vivre dans une grande bibliothèque construite selon mes spécifications avec des étages multiples, des divans en cuir, des boiseries, du marbre, du feutre, un éclairage spécial. Je serais à la tête d'une équipe chargée de concentrer le savoir et d'élaborer la philosophie visionnaire du 21e siècle.

samedi 18 juillet 2009

Adam Smith et moi

J'ai commencé à lire hier The Wealth of Nations de Adam Smith, très bon livre que je ne pouvais plus lâcher. J'ai été surpris de voir la valeur d'échange et la valeur d'usage, notions que je croyais être de Marx. Alors que je lisais confortablement au café, je reviens vers l'intro et je lis avec horreur : «Abridged version». Une chance que je n'avais pas commencé mon soulignage intensif. J'ai appelé au magasin et je suis allé l'échanger contre la version Penguin en deux tomes, livres 1 à 3 et livres 4 à 5. J'en ai profité pour acheter On Liberty and other essays de Mill. J'ai bien pris soin cette fois de vérifier si ce n'était pas une version abrégée. Je sais que tous ces textes sont offerts gratuitement en ligne, mais «ce qui est gratuit ne vaut rien»; par conséquent, personne ne lit ces textes gratuits qui sont virtuellement morts, et personnellement, j'ai besoin du contact papier, j'ai besoin de souligner, de prendre des notes dans le livre, de toucher le livre, de le sentir, de le transporter avec moi où je veux, quand je veux, dans n'importe quelle situation, même la pluie. À partir du moment où j'achète le livre, il est à moi, et il devient une partie de moi-même une fois que je commence à le lire et à le souligner (je le souligne beaucoup, à la fois pour me constituer des repères et pour qu'il soit invendable).

Alors je sors de chez Paragraphe, j'ai une envie de pisser. Je vois la toilette du café adjacent, mais c'est pour les clients seulement : non merci, je bois déjà assez de café comme ça. Je continue mon chemin, rien en vue, alors je rentre dans le Centre Eaton et je vais en bas aux toilettes. Il y a grande foule : l'air conditionné. Je fais mon petit besoin, je cherche du papier pour m'essuyer la bistouquette, mais il n'y en a pas, alors je secoue avec vigueur en espérant que ça fera l'affaire. Je me regarde dans le miroir : fais dur, cheveux raides, la frise ne pogne pas, je me lave les mains comme je peux, et je vois apparaître tranquillement un petit spot de pisse sur mon short... Câlisse... Je ne regarde pas trop mon spot pour ne pas que les autres me voient faire et regardent à leur tour, et que finalement tout le centre commercial me regarde le spot de pisse et que ça passe sur les écrans du Centre et ensuite en première page du journal et au bulletin de 18h, après avoir fait le tour du monde sur YouTube et s'être rendu jusqu'en Chine. J'utilise mon sac de livres comme bouclier en le portant drôlement comme une sorte de sacoche, me donnant l'air tapette, et je me résous à acheter quelque chose pour pouvoir m'asseoir quelque part incognito et attendre que ça sèche.

Je prends un smoothie aux fraises avec des «tites boules noires» (tapioca? vraiment?) chez Bubble Teaser en me collant le plus possible sur le comptoir et en feignant de lire mon livre pour regarder à la dérobée où en est rendue la progression du spot de pisse. Content de mon achat, je vais m'asseoir et je lis On Liberty de Mill. C'est à ce moment que j'ai réalisé que les centres commerciaux, malgré tout le mercantilisme régnant, ne sont pas des endroits inappropriés pour la pensée. Au contraire, la promiscuité, la foule et le bruit, permet de se constituer une sorte de bulle dans ce nouveau faux agora, ce nouveau faux lieu public, où tous se rejoignent pêle-mêle pour consommer. Les penseurs devraient pouvoir y trouver leur place et leur inspiration, sans qu'ils aient à y être forcés. Aristote disait : «Tout homme est son lieu là où il est.» Je vous donne rendez-vous au centre d'achat.

Queue folle, amour fou

Je me réveille le matin avec une érection, pourtant ce n'est pas le «désir» qui l'a provoqué. L'érection semble-t-il, engendre le désir, autant que le désir l'érection. Je ne sais pas si le même phénomène se produit chez la femme, probablement, et de façon moins visible, ce qui fait qu'il est difficile de distinguer entre le désir «réel» et l'excitation spontanée qui l'engendre artificiellement pourrait-on dire. Le sexe n'a donc pas besoin du «désir» pour se mettre en marche, puisqu'il marche souvent «tout seul»; c'est une sorte d'exubérance, de gaieté, de «jeu», de surabondance qui cherche l'épanchement. Il arrive de penser que l'érection renvoie à un désir, et celui-ci au sentiment complexe qu'est l'«amour», mais l'inverse peut tout aussi bien être vrai. Oui, l'amour peut naître d'une simple érection venue de nulle part.

vendredi 17 juillet 2009

À propos d'un petit chien

Je marchais vers le métro lorsque j'aperçois dans la mêlée sur le trottoir un petit Yorkshire seul, qui marche vers moi et qui a l'air abandonné. Tout de suite je demande à la dame la plus près du chien s'il est à elle, elle me baragouine quelque chose en anglais comme He's comin from the store, et continue son chemin. Ouin, mais quel magasin? Alors je demande au gars de la pizzéria si le chien est à lui, négatif.

Je surveille le petit chien qui continue de déambuler sans trop savoir où il va, puis un monsieur le remarque mais ne fait rien, et je perds sa trace. Tout en marchant, je me dis qu'il doit être dans la ruelle ou qu'il remonte la rue adjacente et que ce n'est probablement qu'une question de minutes avant qu'il se fasse frapper par une auto. Je me dis : si c'était mon animal qui était perdu et que je savais que quelqu'un l'a remarqué, je voudrais qu'il fasse tout en son pouvoir pour me le rapporter sain et sauf. Et puisque ce n'est pas dans mes habitudes de rester passif et regarder sans rien faire, j'ai tourné le coin pour monter et retrouver la ruelle en revenant sur mes pas, en espérant trouver le chien. Par le passé il m'est arrivé plusieurs fois de sauver des chiens qui avaient été frappés par des autos alors que les gens restaient là sans rien faire à regarder, j'ai même déjà sauvé un bébé écureuil qui était tombé de son nid; le lendemain, après l'avoir réhydraté, j'ai emprunté l'échelle du concierge pour qu'il rejoigne sa famille dans le trou d'arbre qui était assez haut.

Finalement je me retrouve sur une rue plus haut car la ruelle ne communique pas, j'arrive à la rue, je redescends en regardant plus haut sur la rue des deux côtés, aucune trace; je croise la ruelle et le voilà qu'il est là avec la fille de tantôt et un employé de restaurant : ils grillent une cigarette en jasant.

Je me dirige vers eux en leur lançant le chien est perdu? La fille me répond c'est quoi le problème? Tu me suis depuis tantôt... Elle m'accusait de la suivre, la pauvre conne! Une chance que c'était moi le colosse et pas le gars du restaurant, j'aurais peut-être mangé une taloche sans avertissement! Elle me dit qu'il vient du magasin où elle travaille en pointant vaguement dans une direction, ouin... mais quand je lui ai demandé s'il lui appartenait elle aurait pu prendre la peine de me répondre adéquatement en me disant que le chien n'était pas à elle, mais qu'il était avec elle. Ça m'aurait sauvé du temps, car j'avais d'autres choses à faire de plus urgent que de courir après des petits chiens qui ne sont pas perdus figure-toi, sous-idiote.

Bref, je n'ai pas embarqué dans son jeu qui allait évidemment se terminer en insultes car je voyais tout de suite le caractère frustré et revendicateur de cette Italienne anglophone, je lui ai seulement spécifié que j'aimais beaucoup les animaux et que beaucoup de gens déménagent de ces temps-ci et abandonnent leur chien et leur chat. Ceux-ci se retrouvent dans la rue, affamés, complètement perdus et désorientés en cherchant leurs maîtres et se font frapper par des autos ou bien emmener à la fourrière pour se faire gazer, si des enfants ne leur ont pas préalablement courus après pour leur faire du mal.

Elle aurait pu aussi me lancer mêle-toi de tes affaires! T'inquiètes, si je te vois te faire agresser en pleine rue je vais me mêler de mes affaires. Je veux bien faire et on m'accuse de vouloir mal faire : je le prends pas. C'est avec des gens comme ça qu'on fait une belle société solidaire.

Un peu plus tard en marchant sur la rue Mont-Royal je me suis dit : si tu veux bien faire, attends-toi par moments à te faire taper dessus autant que le méchant, sinon plus. Dans ces circonstances de société aliénée où tous pensent du mal de leurs voisins, ça prend du courage pour s'avancer et faire tout de même ce qu'on croit qui doit être fait, sous peine de passer pour trop souciant, et par le fait même, suspect.

Sur Hobbes

C'est avoir une bien piètre estime de l'homme de dire qu'il ne recherche en tout que son propre intérêt; c'est le limiter à être une sorte de machine calculatrice sans idées et sans sentiments. De plus, si on pousse la logique jusqu'au bout, je ne crois pas que l'homme la plupart du temps connaisse son véritable intérêt, il ne pourrait donc en conséquence agir purement dans son intérêt propre que dans de rares cas.

Cette idée assez basse de l'homme est aussi un poison, puisque du point de vue de la théorie des jeux, si l'homme qui est en face de moi sait que je le vois de cette façon, il sera forcé d'agir selon ma vision de lui, puisqu'il sait que mon bien implique de lui faire un tort. À l'intérieur de ce jeu dont les règles sont définies au départ de cette façon, son agissement confirmera ma vision de lui et je serai justifié moi aussi d'agir à sa façon, pourtant induite par moi-même. Ce type de jeu mène au bout du compte à la destruction provoquée du tissu social et force ainsi l'institution du Léviathan qui protège les hommes entre eux par sa poigne de fer, puisque «l'homme est un loup pour l'homme». Cette idée des plus funestes entre toutes est en quelque sorte une prophétie qui se réalise d'elle-même, un véritable poison social.

Les vacances de l'inconscient

Je me lève la nuit pour visiter le cabinet et je me rends compte que je sors d'une multitude de rêves, mais je ne m'en souviens jamais au réveil, pourquoi? Alors que mon jet impétueux frappe contre la faïence (bien à l'intérieur, mesdames), je repasse en mémoire mes rêves, assez plates merci, et là je comprends : mes rêves sont banaux, conventionnels, insignifiants, comme des séries B qu'on écoute distraitement au 7 parce qu'il n'y a rien d'autre ou parce qu'on est trop vedge pour changer de poste ou écouter autre chose de plus intelligent. Je rêve que je fais des statistiques ou que je me fais cuire un poulet, qu'y a-t-il de spectaculaire à se remémorer dans ce genre de rêves? On dirait que l'équipe de tournage, les scénaristes et les acteurs de mon inconscient sont en vacances depuis un ti boutte. C'est problématique parce que j'ai déjà tendance à faire des rêves «réalistes», et que peut-on trouver d'inspirant dans un double de la réalité schizophrénique? Ne serait-ce pas plutôt une sorte de cauchemar plate? Je viens de regarder par la fenêtre : c'est nuageux, embrouillé, ennuyant, mes rêves ne seraient-ils pas à l'image de cette réalité météorologique? Je pense tenir une partie du problème : le manque de lumière : ça brise tout, même la machine à désirs.

jeudi 16 juillet 2009

Randonnée en ville

Je me suis décidé aujourd'hui à partir à la chasse, mon gibier : Milton Friedman, Capitalism and Freedom. Dans le métro, je lis La dialectique de la raison de Adorno et Horkheimer. Le livre est 15$ au McGill Bookstore, le moins cher, j'achète et j'en profite aussi pour prendre le cours de Heidegger de 1923, Ontology - The Hermeneutics of Facticity, dont j'ai l'original allemand qui traîne sur mes tablettes depuis quelques années; je vais enfin pouvoir le lire sans me casser la tête. Je tombe sur Chaosophy de Guattari chez Paragraphe, je lis un peu, n'arrive plus à décoller, puis cache le livre dans la section économie avec l'intention peut-être de le retrouver plus tard. Mes lectures d'hier soir, Prix et théorie économique de Friedman et L'impérialisme de Arendt vont très bien avec mes autres lectures en cours, je suis très heureux. Je ne retournerai probablement pas acheter Chaosophy, en revanche je garde en mémoire les points importants et je vais plutôt me mettre à la chasse de L'Anti-Oedipe et Mille Plateaux de Guattari et Deleuze dans l'usagé, que j'ai souvent feuilletés, mais qui n'arrivaient pas vraiment à susciter mon intérêt à l'époque.

mercredi 15 juillet 2009

Extrait

«L'enfant qui rentre de vacances retrouve un appartement qui lui paraît neuf, propre, en fête. Pourtant rien ne s'y est modifié depuis qu'il l'a quitté. Il avait simplement oublié les obligations que rappellent chaque meuble, chaque fenêtre, chaque lampe, la maison a retrouvé sa paix du sabbat et, pendant des minutes, il est chez soi dans cet univers unique de chambres, de pièces et de corridors, si bien que tout le reste de la vie devient mensonge en prétendant la même chose. Il n'en sera pas autrement avec le monde un jour lorsque, presque inchangé, il apparaîtra dans la lumière constante d'un jour de fête parce qu'il ne sera plus soumis à la loi du travail et que, pour ceux qui rentreront chez eux, le devoir à accomplir sera facile comme un jeu de vacances.»

Adorno, Minima Moralia, par.72

lundi 13 juillet 2009

Le corporatisme et Kubark

Je lis depuis deux jours «La stratégie du choc» de Naomi Klein et je peux vous dire que je n'arrive pas à le déposer. Je fais trop facilement le lien entre cette «stratégie», cette doctrine de Milton Friedman, économiste délirant au plein sens du terme, et les attaques du 11 septembre 2001. De plus en plus je me dis : «Si tu veux te rapprocher de la vérité, crois au pire, et là encore mon petit bonhomme, tu manques d'imagination.» Lorsque l'être humain n'est plus vu que comme une machine et un réservoir d'énergie produisant des mouvements complexes, tout est possible. C'est le respect de l'être humain qui est perdu par la propagation d'idées et de doctrines antisociales, et criminelles, car elles sont «irresponsables».

Il faut apprendre à reconnaître ce genre de criminalité, autant que nous avons appris à reconnaître les perversions idéologiques nazies. Ce genre de crime idéologique n'appartient jamais au passé, mais il est là sous nos yeux, seulement il porte des noms différents et les acteurs ont changé. Nous commettons la même erreur que dans le cas des Lacroix et des Jones : on vole plusieurs millions à des particuliers et on appelle ça de la «fraude», ce qui fait diminuer la gravité du délit. Le pauvre diable qui vole cent dollars au dépanneur du coin se retrouve immédiatement en taule pour au moins un an. Les voleurs en habits subtilisent plusieurs millions et continuent de parler à la télévision et de se promener en toute liberté, avec le sourire et l'air optimiste, car ils savent qu'ils ne seront pas vraiment punis. Ce que je ne comprends pas c'est pourquoi les responsables d'une entreprise qui opère depuis des années en gérant l'argent de particuliers, et qui partent soudainement avec l'argent, après avoir graissé la patte de bien des complices, ne sont pas accusés de «vol» pur et simple. Personnellement, je ne vois pas de différence entre le fait de voler de l'argent dans un compte et le fait de vous le demander à la pointe d'un fusil. Ces gens sont de vrais investisseurs dans de vrais locaux de gestion financière et opèrent depuis des années; si l'argent disparaît soudainement, ce n'est pas parce que tout était faux, c'est parce qu'on est tout simplement partis avec celle-ci, autrement dit, c'est un «vol» et non pas une fraude.

On pense que les tortures, la cruauté et les mauvais traitements étaient le monopole des nazis, et que tout cela est passé, que maintenant nous vivons dans une réalité qui exclue la répétition de telles atrocités : grave erreur. Kurt Gödel avait décelé, lors de la lecture de la Constitution des États-Unis en 1947, des incohérences logiques permettant en toute légalité de transformer le régime politique du pays en régime dictatorial. Aujourd'hui, le mot magique pour vous dépouiller de «tous vos droits» c'est la désignation : «combattant ennemi». En vous désignant comme «combattant ennemi», le gouvernement peut faire ce qu'il veut avec vous : il peut vous détenir à perpétuité et aussi vous torturer, puisque les conventions de Genève ne s'appliquent plus. À l'arrivée des Américains en Irak, il n'y aurait pas de «prisonniers de guerre» (protégés par les conventions de Genève), mais que des «combattants ennemis» : c'était prévu, pour infliger le maximum de souffrances à ces gens qui selon ce que j'ai entendu, n'en avait rien à foutre de la guerre et avaient plutôt peur pour leurs familles en espérant vainement que rien ne se passerait. Les Américains leurs préparaient un «traitement de choc» : 33 000 bombes ont été larguées en quelques jours sur la ville de Bagdad : c'est ce qu'on appelle une destruction totale et un mépris total de la vie humaine, des civils qui n'ont rien à voir là-dedans, un mépris et une démonisation par la désignation de «terroriste» qui sont chose facile, surtout lorsque les croyances religieuses, la couleur de peau et la langue sont différentes.

La doctrine militaire du Shock and Awe, dont Rumsfeld nous a abreuvés à satiété, prend son modèle sur les expériences effectuées à Montréal en 1953 au Allen Memorial de l'université McGill dans le cadre de MKUltra commandité par la CIA, dont le but inavoué n'était pas de faire une étude sur le lavage de cerveau, mais «de mettre au point un système scientifique qui permette de soutirer des informations à des sujets récalcitrants». Le but était la «régression» des personnes visées; 12 hôpitaux participaient à l'«étude». En d'autres termes, on veut rendre ces gens gagas, en leur infligeant des tortures qui laissent des séquelles permanentes : 12 électrochocs par jour, privation sensorielle prolongée, sommeil induit artificiellement, coma, injection de puissants hallucinogènes, injection de curare pour empêcher tout mouvement, etc., et la liste des atrocités s'allonge indéfiniment. Comme j'ai dit plus haut, votre imagination ne suffira pas. La personnalité de ces individus était détruite impitoyablement, et après les traitements ils suçaient leur pouce, se tenaient dans une position foetale et devaient porter des couches. Klein parle du cas d'une jeune fille de 18 ans qui souffrait d'«angoisse». Ewan Cameron, le psychiatre qui fut par la suite traité d'«imbécile criminel» par ses collègues, découvrit que la jeune fille présentait un certain traumatisme probablement causé par le fait que son père, un dérangé, l'agressait sexuellement. Le psychiatre ne fit rien pour aider la jeune fille, au contraire, elle fut internée, privée de ses droits et soumise de force aux traitements sadiques de ce psychiatre béhavioriste dans le cadre de MKUltra. La jeune fille qui selon les dires des infirmières était «gaie, sociable et soignée» et «poursuivait de brillantes études», est devenue gaga, passive, apathique, ne reconnaissait plus les membres de sa famille et présentait les symptômes de la schizophrénie en plus de tendances hystériques... Je parie que vous seriez pareils si on vous avait traité de la même façon : personne ne peut résister à un traitement d'une telle brutalité. Votre personnalité et votre cerveau sont tout simplement anéantis.

Ce à quoi je voulais en venir, c'est que la doctrine militaire et corporatiste du Shock and Awe vise le même objectif : une régression afin d'atteindre la «page blanche», la tabula rasa, pour pouvoir y imprimer ce qu'on veut à notre guise. Dans le cas des patients cobayes, ça n'a pas marché, mais on essaie de faire la même chose à une plus grande échelle. Le but des corporatistes est la déstructuration, l'anomie, l'apathie et la mort de l'État, notre dernier rempart possible contre ces prédateurs. Les emprisonnements massifs et les tortures résultant de la désignation de «combattant ennemi» ont pour but de geler et de terroriser l'ennemi supposé, de causer une «régression collective» afin de lui imposer sa propre conception des choses et de s'approprier son territoire et ses richesses.

Les résultats et les méthodes développées lors des études de MKUltra font aujourd'hui partie du manuel des techniques spéciales d'«interrogation» Kubark de la CIA.

L'indestructible



La mort est si belle : imaginez que le gars en orange est un «corporatiste» oligarque, prédateur antisocial qui détruit tout sur son passage uniquement pour remplir ses poches de «fric» peu importe les méthodes : il écrase sans scrupule la société, la nature et la culture et impose sa vision en toutes choses au mépris de la véritable liberté. Quand déciderons-nous de nous lever, de ne plus avoir peur et de faire cesser ces injustices et ces humiliations?

dimanche 12 juillet 2009

Anal Connection

Je suis très porté sur l'anal, depuis, disons, ma vingtaine. Apparemment que sur les plateaux de tournages des films XXX il y a un petit frisson dans l'air quand c'est le temps de tourner la scène anale, je comprends pourquoi. C'est interdit, c'est serré, ça fait un peu mal pour tellement de bien, il y a potentiellement un jeu de domination et de soumission là-dedans, et aussi, ça pourrait mal tourner... C'est toujours plus sexy une scène anale, de façon non conventionnelle, et ça promet des jouissances extrêmes. Aux États-Unis il y a des cours privés en groupe pour apprendre tout sur l'amour anal et comment bien le faire, par une experte en l'art bien sûr, et qui ne jure que par l'anus.

EntRailleS

Hier soir approché sucer sang ton entaille doigt plaisir Cecilia érection troublé goût ferreux de sang chaleur bouche texture moiteur mains excité au plus haut point jusqu'à maintenant tu ne t'es jamais opposé à aucun de mes phantasmes, ni moi aux tiens, phantasme dépravé et pervers tel que je l'imagine.

Ces derniers temps beaucoup de rêves à propos de carcasses d'animaux. Je me réveillais de ces rêves avec un certain dégoût et inquiet. J'étais sexuellement excité, même moment chasse à la télévision : moi qui est tant dégoûté par la chasse et le fait de tuer des animaux. Imaginé nue avec moi, faire l'amour dans les entrailles encore chaudes, orignal mort. Tes magnifiques cheveux noirs imbibés de sang, ton visage, longues jambes, ton corps était recouvert de ce sang animal, un magnétisme effroyable : celui du fauve.

Je baisais un fauve, toi Cecilia, couverte du sang chaud de ta dernière victime. Moi-même je suis un fauve, mais plus nomade que fauve, et j'aimerais parfois manger des parties de ton corps : j'ai faim de toi. Amours cannibales. Mordiller ces parties de ton corps, lécher le sang menstruel de ton sexe le long de tes cuisses, coulant, chaud, si beau à regarder ruisseller. Tu prend un bain de sang animal, le contraste du sang rouge sur ta peau laiteuse, je t'enlace, mêler ton sang au mien; je passe ma main dans le sang séché de tes cheveux, je me fond en toi, je te baise comme jamais.

La rencontre de K.

C'était une de ces soirées d'automne magnifique, magique, où le temps semble suspendu, et les feuilles des arbres figées dans l'air immobile, éclairées par la lumière rose des lampadaires, donnaient une impression d'artificialité, d'irréalité. Je descendais à pied la rue René-Lévesque, quand, sortie de nulle part, une très grande femme m'aborda en bordure d'un stationnement désert. Salut chéri, me dit-elle langoureusement avec des signes de piasses dans ses yeux. Ses yeux étincelants, perçants, me saisirent par leur beauté et leur vivacité. Cette femme dont les cheveux noir de jais tombaient sur ses épaules d'un blanc immaculé me charma fortement, irrésistiblement, et je lançai de façon tout à fait spontanée, sur un ton absolument sérieux : Tu viens prendre un verre, moi c'est Max, puis marquant une pause emphatique pour souligner le caractère fatal de la situation, et toi? Elle changea son regard de direction en feignant un certain mépris, puis m'ignora un moment, préférant observer le trafic qui se dirigeait vers nous. C'est à cet instant même que je décidai fermement, résolument, justement à cause de cette feinte de mépris qui agaçait fortement mon orgueil, que je ne partirais pas sans elle. Elle héla un taxi qui passait en trombe et le stoppa net, comme pour me montrer son pouvoir sur les choses ainsi que son caractère ferme et décidé, puis me lança sur un ton badin : Je m'appelle K., et c'est moi qui t'invite, salaud.

mardi 7 juillet 2009

Extrait

«[...] là où tout semble clair et bien net, il y a des étrons cachés.»

Adorno, Minima Moralia, par. 36

Le branding

Je commence par la constatation : «Pour l'instant, nous sommes tous coincés ici, laminés entre les dures réalités de la mondialisation économique et l'esthétique persistante du vidéo-clip.» Ce dernier bout de phrase m'a fait du bien, car j'ai pu enfin comprendre pourquoi bien des gens ont l'air si guindés dans leur style pourtant si en opposition justement avec le «guindé». Je m'explique : quand Marylin Manson veut «déguinder» les jeunes, son nouveau «code vestimentaire» est si chargé, singulier et rigide, que les jeunes sont maintenant «guindés», mais d'une nouvelle façon. Ça semble paradoxal, mais pas si on fait une lecture au deuxième niveau : comment être guindé, tout en ne l'étant pas. Les jeunes veulent se différencier tout en ayant l'air cool, mais plus ils veulent se différencier, plus ils sont conscients de leur démarche, plus ils se guindent en obéissant à un code vestimentaire strict. Finalement, ils se retrouvent dans une situation pire que le guindé qui n'est pas vraiment conscient de son attitude.

Ces façons de s'habiller, de penser, de parler, de marcher même, que les jeunes imitent, ne font que montrer à quel point ceux-ci sont malléables. Au fond, cette espèce de grand fanal aux allures d'extra-terrestre ne fait qu'imposer son branding, sa marque de commerce à la jeunesse, comme toutes les autres entreprises. Ici comme ailleurs, même si on aimerait penser que cela mène à quelque chose de «révolutionnaire», on ne fait toujours que parler d'argent. Les entreprises ont même trouvé le moyen de faire un branding avec le grunge, un concept conscient et voulu, de façon à pouvoir l'identifier concrètement, identifier ses adhérents et l'exploiter. Eh oui, la récupération est totale et elle tue tout : même le style «décâlissé», non voulu et je-m'en-foutiste du grunge est une marque de commerce maintenant. Vous n'avez qu'à mettre un t-shirt sale et ne pas vous peigner le matin en vous levant pour avoir l'air de Kurt Cobain et être «conforme». Conséquence : ceux qui écoutent du grunge ou encore du punk aujourd'hui, ne sont pas, ne peuvent pas être de vrais «révoltés». La popularisation amène l'imitation et la rhétorique capitaliste finit par avaler toutes les marges. On se retrouve toujours à la fin avec du toc, sous une «marque déposée».

dimanche 5 juillet 2009

Extrait

«[...] et c'est la même logique qui mène en droite ligne de l'évangile de la joie de vivre à la construction d'abattoirs humains [...]»

Adorno, Minima Moralia, par. 38

jeudi 2 juillet 2009

Extrait

«L'attachement fanatique pour l'automobile recèle un peu de ce sentiment d'être physiquement des sans-abri [...]»

Adorno, Minima Moralia, par. 91

mercredi 1 juillet 2009

Dead On Arrival

J'écris dans le noir à la chandelle en cet après-midi ennuagé. Je n'ai rien à dire; mon esprit est ravagé, je ne sais pas pourquoi. Je suis resté planté hier devant l'ordi toute la journée, en m'occupant autant que j'ai pu pour éviter de penser à la bière, que je suis totalement écoeuré de boire. Je crois que n'ayant plus d'occasion de relever des défis, je m'agresse moi-même. Je viens de lire d'ailleurs une petite étude là-dessus comme quoi l'agression est un comportement qui récompense le cerveau en dopamine et la renforce. Intérieurement, je crois que c'est effectivement un besoin vital chez moi de «chasser», et je suis en train de mourir parce que je suis écrasé dans mon fauteuil de confort et que je marine dans ma sécurité comme un idiot. Vaut mieux crever de façon intéressante que pourrir dans cet enfer tranquille qui tue d'ennui de toute façon. La fin de ma consommation de dope me fait réaliser que la vie est plate en sacrament. D'une façon ou d'une autre, je suis coincé. Tout le secret je crois, est dans le fait de ne pas voir, de s'aveugler volontairement, et de faire sa petite affaire en prenant bien soin de mesurer les doses. Mais le problème, c'est que je n'ai jamais rien mesuré de ma câlisse de vie. On «décolle» rarement de façon «raisonnable». C'est comme pour l'amour, s'il devient complètement «raisonnable», ce n'est plus de l'amour. Aimer, c'est plus ou moins perdre la tête, sans qu'on puisse rien y faire. Celui qui se gèle vise le même état d'une certaine façon : il veut perdre le contrôle. Je me suis toujours débarrassé de moi-même, parce que je veux me débarrasser du monde, en tout cas, de ce monde.

Écoeurement total

Je me sens seul, fatigué, inutile, je n'arrive pas à arrêter de boire. Je n'ai aucun but à long terme, par conséquent, I feel fucking lost. Je ne sais plus où j'en suis rendu. Peut-être devrais-je aller prendre une marche sur le Mont-Royal, regarder la ville de là-haut, essayer de définir mes nouveaux objectifs à atteindre et prendre des résolutions. Ça marchait dans le passé, une bonne marche annuelle où je me ressourçais. Ce qui me manque le plus c'est une bicyclette pour foutre le camp loin, vite et en toute liberté, mais mon appart n'est pas assez grand et en plus je suis cassé. Je vais passer mon été enfermé chez moi, mais je ne suis plus capable, je vais sortir, j'ai besoin de souffler. Je vais me remettre à l'entraînement intense au lieu de boire des fleuves de bière.

Je suis végétal

J'ai passé la nuit à jouer aux échecs comme un obsédé. Une des rares nuits où je n'ai pas bu. Faut dire que j'essaie de prendre un break de l'alcool parce que je dépéris à vue d'oeil. Ça marche pour l'instant, je dois juste diminuer les quantités et retourner au gym, activité que j'ai délaissée depuis un mois. La santé va sûrement revenir bientôt.