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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mercredi 24 juin 2009

Le jeu des formes

Dans l'inconscient, jamais négation ni opposition ou réconciliation des contraires. Juxtaposition des contraires, ou des personnes, ou des choses. Pas de principe de non-contradiction. Exemple : Lost Highway, qui, selon moi, est tout simplement une histoire racontée en mode onirique du début jusqu'à la fin; le personnage mystérieux représenterait l'inconscient (le narrateur), qui tire en quelque sorte les ficelles du déroulement de l'histoire/rêve. Dans le rêve, il n'y a aucun problème à ce qu'un personnage se transforme en un autre ou encore à ce que celui-ci soit deux personnages en même temps, en deux endroits différents, mais ne formant qu'un seul lieu.

Mon sujet : pas le rêve, mais la rêverie et le flux des pensées juxtaposées à la réalité; l'autre réalité.

Platon : la réflexion rapproche du divin. L'amour est un tyran : une fermeture à l'autre, aux autres possibilités et finalement, à soi-même?

L'ordre de la reproduction répond à des critères généraux de l'espèce, des critères premièrement physiques. La beauté n'est-elle que cela? Une réponse à des critères généraux? Différentes sortes de beautés, différents appels? La beauté inutile est-elle la plus belle? Ce qui est visé : le plaisir ou la multiplication, ou les deux?

L'âme et la psuchkè ne se recouvrent pas. La psuchkè n'a pas de destination. Le but est d'être bien en cette vie-ci (les premiers dialogues platoniciens).

Le corps est le premier signe visible de la santé. C'est pourquoi les critères sont premièrement physiques. Cependant, nous ne cherchons pas tant la santé que la beauté des formes : l'explication biologiste a ses limites. Elle aimerait constamment nous ramener à des animaux raisonnables et prévisibles : ses critères sont donc raisonnables. Ce sont les formes qui provoquent l'excitation, pas la santé. Et les belles formes ne sont ni une garantie de santé, ni une garantie de plus grande adaptabilité. Caractéristiques des formes : formes pleines, courbes, carrées (chez l'homme, reflète la solidité). Les formes répondraient à d'autres qualités que la santé, que nous désirons, que nous admirons, que nous trouvons belles sans jamais savoir pourquoi; peut-être des rapports mathématiques précis de proportion ou de disproportion. Le corps est méta-physique. Il dépasse ce qu'on peut penser de lui en termes simplement physiques. Le but premier n'est pas la multiplication, mais le jeu des formes. Dimension essentiellement ludique de la sexualité.

Je ne peux m'empêcher de penser ici à un événement particulier en rapport avec la beauté. Il y a plusieurs années, moi et ma blonde on s'est rendue dans une animalerie pour acheter un chat. Immédiatement, un chat en particulier attirait son attention : un chat blanc et noir avec une grosse tache noire sur le menton et une sur la babine. La tache sur le menton faisait l'impression d'une barbichette et l'autre, d'une petite moustache à la Hitler. Je ne le trouvais pas beau, précisément à cause de ces taches; je trouvais que ça le défigurait, et je préférais avoir un chat sans taches dans le visage. Par contre, ma blonde trouvait que le chat était beau précisément à cause de ces taches! Ça lui donnait du caractère, un certain air de défi qu'elle disait. Finalement, j'étais en désaccord, mais nous l'avons pris quand même. Le temps a passé, j'ai appris à connaître ce gros matou, et puis finalement, je ne sais pas à quel moment, j'ai fini par trouver que ses taches le rendaient plus beau, lui donnaient un air baveux, effronté, rebelle, que j'aimais beaucoup. C'est alors que j'ai compris que j'avais jugé de la beauté de ce chat d'après des critères inadéquats d'uniformité de couleur et de symétrie, qui sortaient je ne sais d'où. Probablement de la volonté d'ordre et de système que j'avais à l'époque. Les critères de beauté pourraient en partie émaner de l'idéologie dominante, ainsi que de principes généraux que nous avons adopté pour une raison ou pour une autre.

Mon sentiment est que des forces très complexes sont à l'origine de nos évaluations esthétiques et que leur origine n'est pas claire, ni la direction dans laquelle elles vont. Personnellement, il m'arrive souvent de trouver belle une femme par sa façon d'être, ce qu'elle me fait ressentir d'elle, comme la douceur, l'intellectualité, la passion, la maîtrise de soi, etc. Ce sont des idées-formes qui peuvent aussi être évoquées par la danse. Par exemple, l'évocation de l'intellectualité peut être importante pour moi, car ainsi j'ai l'impression que l'autre personne a plus de chance de me comprendre, de pouvoir partager avec moi, de fusionner, etc. Autrefois, je n'aimais pas l'évocation de l'intellectualité chez une femme, car je croyais que cela ne causerait que des disputes sur des idées. Par conséquent, je trouvais plus belles les femmes qui étaient insensibles à la culture. Certes, les caractéristiques physiques sont importantes, mais elles doivent renvoyer à des critères, sinon l'oeil ne voit pas; dans le cas contraire, l'oeil voit plus que ce qui se trouve objectivement devant lui.

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