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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mardi 23 juin 2009

Dead Inside

Rêves récurrents de drogue. À mon réveil, envie de consommer. C'est toujours ainsi; ça se passe dans la tête, comme une infection; l'idée, le goût se propage par l'intermédiaire de ces rêves maudits qui me font croire que j'en ai besoin. Qu'est-ce qui se passe dans ma tête? Le souvenir me revient : ça fait plusieurs jours d'affilée que je fais le même genre de rêves; des rêves qui orientent ma journée, mes humeurs, mon énergie. Mes rêves jouent, en quelque sorte, un rôle d'autosuggestion, d'autoprogrammation même, car il est rare que je ne finisse pas par succomber, mon corps se trouvant réellement affecté par ces rêves, et par conséquent, je vis une sorte de manque, alors qu'il n'y a objectivement aucune dépendance physique. La récurrence à intervalle presque régulier de ces rêves indésirables me laisse croire à un mécanisme secret de cette drogue. Je sais, par exemple, que l'abus de café sur plusieurs jours m'amène rapidement à ce genre de rêves. Le stress négatif, les émotions négatives, l'ennui, la lassitude, les sentiments de détresse ou d'échec produisent aussi le même effet.

Peu importe, je ne consomme plus, mais l'envie est toujours là et revient périodiquement, implacablement, et me tenaille. Je dois vivre avec elle, et attendre qu'elle passe d'elle-même. Je me sens complètement misérable dans ces moments-là. Je me sens mort en dedans.

Cette envie, c'est comme une envie de l'autre, ou encore un besoin de croire. Amour, sexe et religion. Cette envie de l'autre, d'autrui, n'est pas nécessairement meilleure pour notre santé ou notre bien-être en général; car lorsqu'elle nous tenaille au plus fort, elle peut être encore plus destructrice qu'aucune drogue. L'amour est la plus forte des drogues. Son effet peut-être autant positif quand tout va bien, que négatif quand tout va mal. J'ai souvent préféré mes pires bad trip de drogue à mes peines d'amour, absolument dévastatrices, et qui m'ont souvent donné l'envie d'en finir avec la vie.

Aussi, le besoin de croire en quelque chose, de s'accrocher à un dieu ou à une vérité absolue qui nous prescrit une morale, sans jamais nous confronter à notre liberté, est une addiction au même titre que la toxicomanie. Cependant, ce besoin de croire est peut-être encore plus fort que l'amour. Remplacer la drogue par la religion, c'est remplacer une addiction par une autre addiction, qui nous coûte notre liberté au même titre de la drogue, mais de façon systématique, au lieu de chaotique.

Si toutefois j'étais forcé de choisir, je choisirais le chaos. Les paradis artificiels sont autant dans les églises que dans les rues ou dans les maisons. Ces éléments (amour, croyance, psychotropes) cherchent tous à abolir la distance entre soi et l'autre, à créer un lien où nous nous fondons en l'autre. Le but est-il, dans tous les cas, de se perdre soi-même de vue? Dans ce cas, les grandes passions qui nous emportent n'ont-elles pas le même effet? De nous fondre dans l'objet? Dans l'en-soi? (Sartre) Le Wegsein serait-il une caractérisation plus précise de l'homme que le Dasein? (Heidegger)

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