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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mercredi 19 mai 2010

Sur la relation chair/désir

Hier soir, je revenais du boulot, je prenais le métro tout en poursuivant ma lecture de Husserl. Je regarde de temps en temps les filles qui rentrent, des fois je fais semblant de lire en regardant vers le bas, mais en réalité, j'examine leurs pieds pour voir s'ils sont beaux. Je somnolais, comme il m'arrive assez souvent, alors je pensais à tout plein de choses, le sexe entre autres, mais la philo aussi, etc.

À un moment donné, deux jeunes femmes rentrent dans le wagon. Je dirais entre 19 et 21 ans. Un peu trop jeunes, mais quand même, les hommes regardent tout ce qui est intéressant, surtout quand on voit de la chair. La première était assise, longs cheveux bruns, pantalons, visage moyen, le seul bout de chair qu'on voyait, c'était ses pieds, et ils n'étaient pas beaux plus qu'il faut. La deuxième était plus intéressante : debout à côté de l'autre, longs cheveux bruns aussi, une jupe courte, un visage assez joli et de belles jambes. Je me suis surpris plusieurs fois à regarder ses mollets, ils étaient beaux, elle avait une belle peau, elle excitait.

Il ne m'arrive pas souvent de regarder les autres hommes qui sont en train de regarder les mêmes femmes que moi, mais quand ça m'arrive, je trouve ça assez drôle la plupart du temps, parce que je vois un peu de ce que j'ai d'lair. Alors, mon regard, au lieu d'aller directement à la femme, passe de l'homme en train de regarder à la femme regardée. J'essaie de voir ce que le gars voit, et j'essaie d'imaginer ce que la femme ressent à être regardée ainsi. Est-ce que ça l'excite ou ça l'achale? etc.

Il faut dire que le gars est assez facile à regarder puisqu'il a le regard fixe sur la fille en question. On peut le voir en train de la manger des yeux, ce qui me fait un peu honte en pensant que ça m'arrive des fois et que probablement d'autres hommes le remarquent. Ils savent alors que bien que je sois en train de lire l'austère Husserl, je ne pense qu'au sexe. Ça doit être assez risible.

Bref, un homme fin quarantaine s'approche. Il est à une bonne distance de moi, mais je remarque tout de suite son avancée déterminée : il a une fixation sur les pieds de celle qui est assise... Alors qu'il se met en position, les mains après la rampe du haut, je vois ses yeux qui fixent de biais les pieds de la jeune femme, je me suis dit : «Tiens, je ne suis pas le seul qui est obsédé par ça apparemment.» Je regarde ce qu'il regarde, mais je ne trouve pas ça plus excitant qu'il faut. Mais peut-être qu'il alternait entre différentes parties du corps, comment savoir, je ne voulais surtout pas qu'il me surprenne en train de le regarder, alors je revenais très souvent à mon livre.

Cette situation m'excitait beaucoup. Pourquoi? Parce que j'imaginais cet homme d'âge mûr à l'air viril en train de baiser cette jeune femme avec force et désir. Il la voulait, c'était clair, et c'est ce que je trouvais excitant : la manifestation sans ambiguïté de sa volonté, son désir, sa détermination : il voulait cette femme, il voulait l'aimer, l'embrasser, la lécher, la chérir, il voulait la fourrer encore et encore, mettre son pénis dans sa vulve, son cul, sa bouche et lui prodiguer son sperme tsunamiesquement dans tous ses orifices.

C'était un beau bonhomme, veston, chemise, souliers de cuir propres. Il avait des mains carrées, un tan, et je crois que c'était un homme qui s'entraînait, car il avait une bonne poitrine avec probablement des pecs et de bons abdos. Avec toute la détermination qu'il avait, je savais que c'était un homme qui devait fourrer comme une bête, aucun problème d'érection là-dedans. Il baisait sûrement plus fort et mieux que bien des jeunots de vingt ans, en plus avec l'expérience, oublie ça, c'était une bombe sexuelle. Il faisait de la calvitie en avant et ça allait jusqu'au milieu de la tête, mais il avait quand même une belle allure, le reste de ses cheveux bruns était bien fournis et ça nous faisait oublier l'espace lisse qu'il avait au-dessus du front. Pour moi, c'était la marque d'un homme fin quarantaine, très viril, déterminé, agressif tout en restant diplomate, et très actif sexuellement. Il me faisait beaucoup penser à Mr. Eddy de Lost Highway qui avait pour blonde la belle Patricia Arquette du temps.

Ce petit épisode dans le métro m'a alors fait réfléchir à la porno. Pourquoi la porno n'est-elle la plupart du temps pas excitante?

Ma réponse : parce que les gars qui fourrent dans ces vidéos n'ont pas de désir, c'est comme de la routine, ils font de la «gymnastique», et les filles aussi. On voit bien que c'est une industrie et que c'est du fake et que c'est toujours la même petite gang qui fourre ensemble.

Aussi, ce n'est pas de voir une graine rentrer dans une vulve qui est excitant en soi. Ce qui est excitant, c'est le «désir», autrement dit, l'excitation que provoque une personne sur une autre personne. Il est infiniment plus excitant de voir un homme se filmer dans une chambre d'hôtel en train de baiser sa maîtresse avec force et désir, même si on ne voit presque rien ou que l'image est de mauvaise qualité, que de voir des gros plans haute définition de pénétrations de queues dans des plottes en mode «gymnastique» avec en surcroît de faux cris de jouissance.

Bref, c'est ce que j'avais à dire concernant la relation chair/désir, et ma conclusion est que finalement, l'«amour» ça se passe beaucoup plus dans la tête que dans les yeux, au sens où c'est psychologique, cérébral, et que c'est une question d'observation et de perception du désir de l'autre qui n'a aucun rapport avec ce qu'on voit «réellement», chosalement, que ce soit sur l'image digitale ou en personne. Je ne vois que de façon floue deux corps qui s'entrelacent dans la vidéo amateure, mais le «désir» est là, je sens que quelque chose se joue dans la tête des partenaires. Que c'est vrai, qu'on y est, que c'est ça, oui, tromper sa femme, et que c'est ça, oui, coucher avec un homme marié, mais auquel la force du désir nous empêche de résister. C'est charnel, c'est une relation risquée, on hésite, il ne faut pas tomber en amour, il ne faut pas s'attacher, on se retient, on explose de désir, etc. C'est du vrai sexe pur et désirant où le sentiment côtoie dangereusement la chair...

Aussi, ce qui devait exciter le plus l'homme mûr du métro qui regardait la jeune femme, qui selon moi, n'avait rien de particulier, ce devait être ça : sentir que quelque chose se joue dans sa vie, et que ce «quelque chose» pourrait aussi se jouer dans la vie de la personne désirée.

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