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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

lundi 13 septembre 2021

Bleed It 2

Ma semaine de paranoïa totale s’est terminée et je suis encore vivant j’ai survécu à cette nuit endiablée je frôlais les rebords du précipice de mon lit en suant à grosses gouttes malade comme d’une affection inconnue j’avais le vertige prêt à dégueuler à tout instant toutes mes tripes je ne pouvais croire que j’arrivais à l’inévitable que je l’avais provoqué même je me disais à tout instant merde pourquoi pourquoi j’ai fait ça mais pourquoi pourquoi ne te tiens-tu pas calme penaud bonhomme c’est ce que tu devrais être et faire calmer tes petits nerfs arrêter la chasse aux femelles exotiques j’avais texté Stéphane mon nouvel ami mais il s’est révélé plus coincé que je pensais premièrement il était supposé me répondre mais il ne me répondais plus on avait commencé par le billard et j’avais le radar sur les femmes puis la bière aidant j’ai ouvert mon jeu mais il n’y avait rien de potentiel dans le coin on est allé au 1026 et là y avait autre chose on a continué à boire j’ai mangé une frite on a bu on a peu parlé enfin non ce n’est pas vrai j’ai pratiquement parlé seul tout le long je l’ai inondé de paroles sulfureuses à chaque candidate qui se présentait c’était le découpage en tranches il m’a traité de satyre mais je m’en foutais comme dans l’an quarante et je continuais finalement j’ai interpellé la fille au bar j’avais envie d’impressionner mon faux coincé je lui ai dit eh, c’est toi Amy? elle m’a répondu oui j’avais eu l’intuition que c’était elle ne me demandez pas comment mais c’est ma femme de ménage je crois qui m’en a parlé elle matche le monde oui elle m’a demandé comment je savais ça je lui ai dit que je ne m’en souvenais plus et c’était presque vrai mais de toute façon je ne lui aurais jamais dit elle semblait intriguée et fière en même temps je lui ai parlé de moi pour lui laisser croire que je voulais qu’elle me matche mais le problème c’est que je ne vais pas souvent à cet endroit je lui ai laissé un bon tip pour la confirmer dans ma volonté mais je m’en foutais un peu je ne croyais pas la chose possible de toute façon toujours est-il qu’elle me dit qu’elle allait peut-être aller au Old Brass Rail ce soir j’ai bu encore une bière en vitesse parce que j’avais Nicole qui me poussait dans le cul pour me présenter une artiste chanteuse au Centre civique en train de donner un spectacle une connaissance ou une amie j’ai jamais vraiment su mais c’était n’importe quoi j’étais en chemin et plus je lui demandais des détails plus ça semblait s’enfoncer puis finalement il s’est avéré que l’entrée était un peu chère pour le temps que j’allais y passer je n’avais pas vraiment envie puis finalement elle avait un chum depuis octobre eh ben en voilà des nouvelles tout le monde est casé icitte j’ai viré de bord je suis rentré dans le but de faire une sieste que je n’ai jamais réussi à faire puis l’heure était arrivée de me préparer il était plus tard que prévu nulle nouvelle de Stéphane qui mystérieusement ne répondait plus à mes textos je me suis dit que peut-être j’avais exagéré au 1026 et effectivement j’avais exagéré parce que j’exagère toujours et que j’aime l’exagération j’adore exagérer en tout temps je ne sais pour quelle raison mais l’exagération me plaît et c’est justement au moment où je devrais rester posé et véridique que j’exagère le plus c’est comme plus fort que moi un double en moi qui m’emporte qui prend possession de moi je deviens un autre que moi-même pendant quelques instants parfois pendant une nuit entière tout ce que je dis est de la foutaise à l’exposant dix de l’exagération pure de la divagation on m’a toujours dit d’arrêter d’exagérer même quand j’étais petit ma mère me disait toujours d’arrêter d’exagérer mais c’était plus fort que moi il fallait toujours que j’exagère et si on me le rappelait j’exagérais encore et encore plus jusqu’à ce qu’on arrive plus à voir la différence entre l’exagération et la vérité tellement que je m’y prenais même moi-même j’étais en première loge à mon spectacle complètement délirant je disais n’importe quoi d’invraisemblable puis tout le monde foutait le camp parce qu’ils me croyaient devenu fou et pourtant j’étais complètement sain d’esprit mais je ne savais jamais pourquoi j’étais poussé à l’exagération c’était comme un petit quelque chose d’indétectable qui tout d’un coup s’insinuait dans tout mon être et le déformait dans un sens inconnu de moi un sens que je croyais la vérité enfin pour un instant une heure une nuitée puis le lendemain je réfléchissais à ce que j’avais dit puis je me disais que c’était invraisemblable que c’était inconcevable que j’aie pu dire ça puisque quand j’y pense c’est complètement faux et pourtant sur le coup j’y ai cru comme si j’étais une autre personne inconnue de moi ou même fou toujours est-il que j’ai été au bar où nous devions nous rencontrer moi et Stéphane mais nulle trace de mon bon gaillard de Français puisque ce bar était vide alors qu’on croyait qu’il allait être plein je me suis dirigé au dernier bar possible le Brass j’ai payé mon cover Annabelle la barmaid m’a salué puis je me suis commandé une IPA comme toujours il y avait quand même pas mal de monde j’ai regardé à l’entour un peu dans le vide je cherchais des minettes puis je suis tombé sur la tronche de Stéphane accoudé bien calmement comme un papa au bar

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