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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

lundi 13 septembre 2021

Là où je vais

Là où je vais je ne serai plus seul je n’aurai plus froid, sur la photo je reconnais ce sourire ces yeux espiègles ce sont ceux de ma femme aux longs cheveux bruns au rire coquin qui m’a toujours rempli de joie, j’aimais t’entendre rire de ce rire rauque moqueur nasillard qui me faisait penser au rire d’une adolescente en train de muer, un rire jeune, sincère, empreint d’une insouciante légèreté, j’aimais te prendre dans mes bras comme une petite poupée ta tête arrivant au milieu de ma poitrine, je te prenais par la taille et te soulevais pour t’embrasser ou je me penchais comme un géant maladroit et rejoignais tes lèvres, nous étions toujours unis par la complicité, par le baiser des amoureux, unis pour la vie, et je te disais c’est pour la vie, pour la vie, oui l’hiver vient et nous serons mariés dans le froid et le givre, nos lèvres s’uniront à jamais nos silhouettes se figeront ensemble pour l’éternité tout en haut de l’escalier en béton gelé nous ferons des poses pour le photographe, frigorifiés dans le vent transperçant de janvier mais l’un contre l’autre heureux d’être enfin unis par le mariage, nous rentrerons à l’hôtel et ferons l’amour, joindrons nos mains nos bagues dans un cri de jouissance, tu es mienne, je suis à toi, la nuit nous enveloppera dans le givre et le froid.

Un matin je me réveillai et ce fut la dernière fois que je couchais avec toi… Ma vie venait de changer à jamais. Il y avait maintenant un avant et un après, et un trop tard… Je me suis effondré en moi-même, incapable de réaliser ce qui était en train de se passer, j’avais perdu celle que j’aimais. Je découvrais ton nouvel amour, tes mensonges, ta trahison. L’inconcevable était arrivé, tu m’avais abandonné sans retour. Jeté là comme un déchet inutile, un croûton, un torchon, un homme fini. Je suis tombé dans des crises de panique sans fin, des cauchemars de sueurs froides emmitouflé sans effet dans la perte le deuil la nuit noire m’avala au fond du gouffre et les jours passèrent immobiles figés dans le froid de l’éternité la folie oui c’est pour la vie, dis-moi je suis tout pour toi tu es tout pour moi baise-moi fais-moi jouir oui plus fort je viens en toi mange-moi prend-moi en toi, tue-moi tue-moi

mon esprit ruiné éclaté le cœur en sang tripes à ciel ouvert à découvert la conjoncture néfaste l’amour me ment la vie me trahit le destin me fend je fond en larmes au fond du baril le navire coule à pic suivant les directives les statistiques l’hiver sera long et froid gelé comme une balle je traverse les coups du sort les rafales de néant qui font boule de neige par les temps qui courent la conjoncture funeste sinistre qui n’a pas fini d’achever me pourchasse me traque veut ma peau mon cerveau ma libido du cash du solide les planètes crashent dans mon appart la lumière filtre les volutes annoncent le carnage l’hiver sera rude et froid comme une blessure ouverte à tous les horizons protoplasmiques la conjoncture givrée comme une balle me traverse le cœur l’esprit la vie apocalyptique se désiste de l’enfer se tourne vers moi me vise droit au cœur au centre mon être se déchire en désarroi mon esprit saturé explosé le cœur au bout du rouleau compresseur les espérances en ruine la vie me ment l’amour me trahit le destin fond sur moi me fend à belles dents suivant les statistiques au fond du baril je coule à pic dans le néant le vent sera rude et cruel glacial hivernal je me sens mourir je ne suis plus là désolé la vie continue sans moi le destin me trahit dans la boue voici la voix ça sent la mort le moisi le roussi ferme les stores amène-toi par ici regarde la fin du monde le diable veut être ton ami l’hiver sera froid et désincarné en moi sans moi sans toi le gèle sera l’instant présent et la perte ça sent le sang me pourchasse me traque veut ma peau mon cerveau mes os les planètes se désaxent tout se renverse en son contraire je flaire le sang sur tes cuisses ta bouche ma bouche boit ta blessure ta vomissure tu me susurre la version le venin la mort au fond de toi je coule à pic mon vaisseau crash dans tes entrailles tes labyrinthes tes univers ectoplasmiques suivant la nervure les statistiques apocalyptiques prédisent un hiver plutôt froid et rugueux bien arrosé de larmes salées au goût d’antan comme tu l’aimes dis-moi je suis tout pour toi tu es tout pour moi dis-moi dis-moi que tu m’aimes dis-moi que tu penses à moi penses-tu à moi je penses à toi je penses à toi oui je t’aime encore plus que jamais oui je t’aime est-ce que tu m’aimes oui je t’aime ne me quitte pas ne me quitte jamais je te veux reste mon cœur bat pour toi ton cœur bat pour moi l’hiver sera rude et froid les rafales de vent nous ferons plonger l’un vers l’autre au fond de toi de moi de nous deux nos bouches s’uniront par le givre sous le ciel bleuté le sang de nos lèvres perlera soudés l’un à l’autre par le froid nous serons un seul corps caverneux sous les couvertures enveloppés des cristaux sans avenir sans lendemain sans souvenir dans la nuit profonde éthylique apocalyptique en détresse de nos dernières pensées nos derniers baisers nos dernières caresses

Là où je vais je ne serai plus seul je n’aurai plus froid sur la photo je reconnais tes yeux mais ils ne me regardent pas.

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