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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mercredi 27 janvier 2010

L'amour éternel

Je revenais hier dans le bus, en me remettant de mon EMG, où on m'a fait bondir les bras avec des décharges électriques comme des cuisses de grenouilles dans une expérience de bio 101, et je pensais à ces deux longs billets que j'avais éliminés il y a quelques mois pour pouvoir mieux oublier de ce dont ils parlaient : eh bien, ça a fait l'effet contraire, ils me hantent les sacrament! Je parlais dans le premier de mon aventure en prison, et dans l'autre, de ma recherche de coke un soir dans le monde des travestis. Mais c'est surtout le premier qui me manque, car j'avais décrit en détail tout le périple et j'y avais mis beaucoup d'effort, pour ensuite l'éliminer au bout de deux semaines... Je n'avais eu aucun feedback pour ce billet, alors je me disais que le monde s'en foutait, ou que ça les embarrassait tout simplement que de me voir conter des expériences aussi peu glorieuses, j'en avais honte un peu en effet... et ça ne cadrait plus du tout avec la personne civilisée et relativement calme que je suis devenue aujourd'hui. Donc, dans un élan de masochisme, j'ai éliminé en une seconde un travail de plusieurs heures, et qui de plus, m'avait coûté à écrire point de vue émotif. Par la suite, quand j'ai vu Beigbeder parler de ses histoires de coke et de séjour en prison en en riant et en faisant rire tout le monde à la télévision nationale, j'ai compris que je dramatisais un peu trop les choses et que je devrais plutôt apprendre à rire de toutes mes conneries, et surtout, apprendre à rire un peu plus, tout court. Je suis toujours trop sérieux, parce que je lis des livres trop sérieux, et surtout, parce que je vois la vie de façon tragique et que je suis stressé à mort par ma propre mort. Il n'y a pas que la philosophie dans la vie, et de plus, dans la joie toute simple et le plaisir de se sentir vivre, on trouve déjà assez de philosophie. Comme disait Pascal : «La vraie philosophie se moque de la philosophie», mais cherchez donc à savoir ce qu'il voulait vraiment dire par là, faudrait en lire davantage. Pour ma part, je préfère rester simple et l'interpréter au premier niveau, c'est tout. On se cassera la tête plus tard sur les détails, et peut-être même que ça voudra dire tout le contraire de ce qu'on pensait au début! C'est ce qui arrive des fois quand on creuse trop : au lieu de découvrir les fondements, on se retrouve en Chine la tête à l'envers!

Vaudrait mieux des fois s'en tenir un peu plus à la surface, ça nous éviterait bien des ennuis. À force de me casser la gueule dans les «profondeurs», j'en suis venu à relativiser un peu plus, à commencer par l'amour... Il m'est arrivé d'être un homme qui aimait trop. Je croyais, en digne romantique, à l'amour éternel; aujourd'hui je sais que ce n'était que pour plaire aux femmes, et je me suis laissé enfirouaper par mes propres discours. En effet, l'amour «éternel» ne court pas les rues, mais il est pourtant sur toutes les lèvres, et on continue d'en rêver, et d'en rêver, et d'en rêver... On cherche la femme idéale, l'homme idéal, puis on se rabat souvent sur des substituts «en attendant». Après tout, il faut bien que la Nature poursuive son oeuvre sans la perfection, qui n'est pas souvent au rendez-vous. Eh bien, cette belle recherche de l'absolu, de la perfection et des «fondements» m'a conduit, plus souvent qu'autrement, direct au poste de police le plus près. L'amour tue : ce fut ma conclusion, et depuis ce temps je n'ai plus de problèmes. Voilà : Éros et Thanatos collés dos à dos, les enfoirés! Je lisais L'Égoïste romantique de Beigbeder, pour lequel, à chaque fois que je feuillette un de ses livres, j'ai l'impression de lire mes propres pensées dans mon journal intime, et je vérifie vainement les dates d'impression pour m'assurer qu'il n'y pas eu plagiat avec mon blogue tellement les coïncidences dans les pensées sont fortes (quoi? quelqu'un qui se fait du gros cash sur mon dos pendant que je pourris dans la merde!?), et je suis tombé sur ceci, que j'aurais pu retaper de mon journal (mais où parmi la douzaine?) : «Pour que les gens tombent amoureux de vous, il n'y a pas trente-six méthodes : il faut faire semblant de s'en foutre complètement.» Bon, d'accord, c'est une pensée assez commune et qui n'a rien d'original, mais il faut regarder l'ensemble. Et de plus, ça ne marche pas à tout coup, puisque si l'autre personne en face de vous pense pareil, il n'y aura que deux asymptotes qui ne se rejoindront jamais, ou qui se rejoindront peut-être, mais dans un élan de passion incontrôlable, et de plus, ça coûtera cher par la suite à celui ou celle qui aura perdu la mainmise sur la situation, car les gens aiment le pouvoir plus que l'amour. C'est un peu comme les ruses dans Le Prince de Machiavel que tout le monde a lu, et qui n'ont donc comme résultat que nous vivons dans un monde plus laid, sans véritables gagnants, car tous connaissent la petite recette du pouvoir et disposent en plus naturellement, aujourd'hui, d'assez de cynisme pour pouvoir prendre certaines distances par rapport aux grands idéaux qui nous ont tant fourvoyés. Un peu de sens pratique et de terre-à-terrisme, ça fait toujours du bien.

Mais voilà aussi, lorsque les ruses sont neutralisées parce qu'elles sont connues des deux personnes, on revient au point de départ, mais au deuxième niveau! Si les deux savent pertinemment que l'autre va l'ignorer et le faire courir pour le faire tomber en amour et avoir plus d'emprise, il va se passer autre chose. Il va se passer une sympatisation par la connaissance mutuelle de la technique de séduction. Le problème maintenant, c'est de savoir si lorsque l'autre personne cède enfin, elle est vraiment sincère ou ça ne fait encore partie que de la ruse... Ça ressemble beaucoup à une guerre froide, n'est-ce pas? Et c'est aussi la personne qui garde le plus la tête froide qui «gagne», ou plutôt, qui ne perd pas. En effet : elle ne perd pas la tête, et donc, la conserve...

Dès que j'ai commencé à garder la tête froide et que j'ai cessé stupidement de chercher la «bonne», ze one, les femmes ont afflué comme jamais. J'ai vu la situation se renverser radicalement sous mes yeux, et je n'en revenais tout simplement pas. Au lieu d'être constamment en disette et d'être obligé de prendre ce qui passe, j'avais le choix! Je me sentais capable d'aborder n'importe quelle femme et de l'inviter, parce que je ne cherchais pas à me l'approprier. Je ne faisais que lécher les vitrines, mais je n'entrais pas. C'est ma conception de la femme comme une «fleur», et non comme une pièce de viande à enfiler, qui a tout changé. Conception très orientale, et très zen et très belle et très libératrice, et au fond, très romantique, mais d'une autre façon : c'est un «romantisme» qui libère au lieu de chercher à s'approprier et à s'accrocher, et qui redonne le respect aux choses et aux individus.

(J'en parle aussi dans ce texte-là, ma conception de la femme comme une «fleur» sans «finalité», car la rose est sans pourquoi :

 http://confessionsdunmalecommode.blogspot.com/2009/05/man.html )

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