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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

jeudi 21 janvier 2010

Les blogueurs «fondamentalistes»

Il m'arrive souvent de croiser des blogueurs sur le Net qui critiquent, via leurs blogues, le contenu anodin ou banal de certains blogues. Par exemple, parler de sa vie de tous les jours dans ses moindres détails, pour ces fondamentalistes du blogue, ça ne devrait pas se faire. Il y a plein de choses qu'on ne peut pas faire sur un blogue, si on veut se rendre «minimalement» intéressant... Voilà une autre façon détournée d'avoir son petit 15 minutes of glory en critiquant ce que les autres font, tout en n'apportant rien soi-même, et d'ailleurs, je ne suis pas à l'abri de la critique de ma critique de ceux qui critiquent, moi aussi j'ai un petit côté «vedette» et j'aime qu'on me lise, même quand je n'ai rien de «spécial» à dire.

Cependant, c’est là où le bât blesse (j'adore cette expression) : qu'est-ce justement, qu'avoir quelque chose d'absolument spécial à dire, et peut-on toujours et constamment dire que des choses spéciales? À quoi s'attend-on vraiment d'un blogue? Je crois que la réponse n'est pas tant à chercher du côté du lecteur, mais plutôt du côté du blogueur lui-même.

Personnellement, j'utilise mon blogue pour m'exprimer, et sur n'importe quoi, c'est tout. On peut aussi bien dire que c'est n'importe quoi, et c'est ainsi que j'aime ça, sinon j'arrêterais de bloguer. Je tiens à avoir une flexibilité extrême, et c'est la raison pour laquelle je n'ai pas choisi de thème ou de sujet précis pour mon blog. Il y a des articles sérieux sur des sujets importants en philosophie, il y a des histoires et des personnages, il y a du cul, il y a mon journal, il y a des détails intimes sur ma vie personnelle, il y a des billets humoristiques, des billets vulgaires, il y a de la musique, des photos, des articles portant davantage sur l'actualité ou mes lectures, il y a aussi du blabla, bref, il y a de tout, et je tiens à ne pas me limiter, parce que je suis tanné de rouler dix blogues en même temps et de tout «compartimenter» de façon ridicule.

Pour ceux qui trouvent que ça a l'air fou parfois, eh bien, allez donc lire les messages d'une ligne et demie sur Twitte des stars hollywoodiennes sur leur propre banalité quotidienne. C'est drôle tout d'un coup, ce que ces gens ont à dire, même si c'est de la plus grande insignifiance, comme de raconter qu'on est en train de se brosser les dents, devient hautement intéressant. Ce qui fait la différence entre ma banalité quotidienne à moi et la leur, c'est que moi je suis un nobody : c'est tout. Et que quand Britney se brosse les dents, c'est une étape importante dans l'histoire de l'humanité, alors que moi, quand je le fais et le raconte en plus, c'est du plus haut ridicule, c'est insignifiant, c'est banal, je devrais aller me cacher de honte...

Voyez-vous, ce qui m'intéresse, moi, c'est l'être humain dans sa «nudité», son naturel, pas les célébrités, qui ne sont d'ailleurs la plupart du temps que des images. Et puis on s'en fout aussi de ces gens, puisqu'on en parle déjà partout, on nous rabat les oreilles constamment avec toutes les Britney du monde : je suis saturé depuis longtemps de tout ça. En fait, j'en ai plusse que plein mon casse des ces poseurs et de ceux qui sont pendus à leurs baskets.

Si j'ai 100 visites par jour sur mon blogue, je suis content, parce que j'ai quand même un certain auditoire et que je déteste écrire dans le vide, même si je n'ai rien à dire de spécial, et surtout si je n'ai rien à dire de spécial. Par contre, si j'ai 20 000 visites par jour : il y a un problème là... Il y a un problème parce que mon blogue n'est pas destiné au mainstream et n'apparaîtra jamais sur la page de Cannëo ou autre : je ne fais pas dans le divertissement «bon enfant» genre Big Maque que tout le monde peut consommer distraitement et sans grand danger. Je ne peux pas mettre des commerciaux bien payés sur mon blogue et bien faire paraître ces compagnies en tout temps, puisque mes billets ne s'adressent pas à un «auditoire universel», c'est-à-dire que le contenu ne correspond pas à un contenu «standardisé», uniformisé et prévisible. Le muselage complet de la «libre expression», et non de la «liberté d'expression» : c'est le prix à payer pour obtenir la «popularité», et celle-ci, une fois obtenue à force de se couper en morceaux, coûte encore plus cher après. Résultat : vous vous donnez entièrement pour les autres, et il ne reste plus rien de vous-mêmes : vous n'êtes qu'une ombre, une image, peut-être une «grande» image qu'on va coller un jour sur tous les murs, mais qui somme toute, au bout du compte, est tout de même «insignifiante», mais attention! c'est une insignifiance de star, alors c'est pas pareil!

Bref, je fais tout ça en grande partie pour le seul plaisir, c'est mon seul salaire de toutes ses heures sacrifiées devant mon ordinateur. J'aime aussi faire rire et me faire rire, me surpasser parfois en écrivant des articles plus sérieux, badiner, complimenter, discuter, travailler mon côté littéraire et raconteur, exprimer mes joies et mes peines, mes petits bobos, etc. C'est d'ailleurs ce que j'aime lire chez les autres blogueurs et je me souviens, à ce sujet, d'un blogueur qui se moquait allègrement des autres blogueurs qui décrivaient en détail leur banalité quotidienne, eh bien, il a fait lui-même un billet sur les détails de sa propre vie banale pour les imiter et s'en moquer, et c'est le seul billet que je me souviens de lui, le meilleur!!! C'était absolument tordant! Le billet était à propos de ses trois morceaux de P'tit Québec (il va se reconnaître là) qu'il mangeait tout en regardant par la fenêtre et en se disant qu'il va probablement mouiller demain... Quelle aventure! Vous trouvez peut-être cela ridicule ou trop simple, mais c'est notre vie de tous les jours «exposée» telle quelle, et c'est ce qui m'a fasciné : de ne pas vouloir en rajouter afin de faire de l'effet, un effet qui selon moi, serait en trop. Il est très difficile d'écrire de façon aussi simple et dépouillée, tout en restant intéressant, et personnellement, j'en suis rarement capable. Ça prend un certain talent, un talent que bien des gens ont, mais dont ils ignorent l'existence ou ne s'en servent pas tout simplement à cause des critiques sur la «banalité» de leurs propos.

Voyez-vous, c'est ça que j'aime sur ces blogues qui sont de véritables mines d'or de plaisir : on s'y exprime librement, sans contraintes, on révèle des détails croustillants, parfois embarrassants ou inappropriés, on parle de sa banalité quotidienne, de ses amours intimes, de ses petits bobos ou de ce qui nous démange en dedans, on dit ce qu'on pense réellement de quelqu'un ou quelque chose, on règle des comptes, et tout cela, bien sûr, sous le couvert de l'anonymat, dont on se plaint tant, mais qui est si utile au fond, et je dirais même, vital, sous peine de devoir s'imposer une auto-uniformisation au fil de la popularité, comme dans tous les grands mainstreams de divertissement de masse. L'important, c'est de ne pas se faire récupérer, mais notre plus grand ennemi là-dedans c'est souvent nous-mêmes, lorsque nous nous forçons sans nous en apercevoir à nous autocensurer.

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