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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

jeudi 15 octobre 2009

Le moment venu, il est trop tard

Je suis laid, puissant et inutilisable. Je suis la laideur que j'ai toujours redoutée.

Ma nature contradictoire rend impossible le mariage : si je suis libre de partir, je reste.

Nous arrivons dans la vie avec nos projets et tous, seuls, nous essayons de les réaliser. Notre vie se résume à une somme de projets, réalisés ou manqués. À la fin, c'est ce qui reste de nous. Tout souvenir du train-train quotidien aura disparu.

Une chose est évidente : je n'ai plus de temps. Acculé au mur plus que jamais, je fais à nouveau de l'angoisse existentielle, mais cette fois, j'ai de vraies raisons. Peut-être signe de grande vitalité, bon signe alors, mais douloureux. Je ne comprends pas comment j'ai pu perdre autant de temps; évidemment, je l'ai gaspillé. Je me croyais immortel. Maintenant, je vois clairement la quarantaine arriver. Je ne veux pas vieillir, je ne veux pas mourir. Je veux la jeunesse, la beauté, la force; je veux plaire. Je veux ces femmes que j'ai manqué à vingt ans, parce que j'avais trop de temps.

C'est en prison que j'ai fait les rencontres les plus profitables, que j'ai rencontré les individus les plus profonds. J'y ai découvert l'homme. Nous nous analysons tous, nous apprenons à nous découvrir, parce que nous sommes coincés ensemble, nous nous sentons solidaires. Nous partageons, et les vraies émotions, les paroles vraies, viennent à la surface. La peine et la douleur, et le temps perdu, et l'impasse. La prison rend l'homme à lui-même, elle le dénude. Puisse celui qui va en prison, en revenir meilleur, transformé.

On passe sa vie dans ses rêves, dans ses fantasmes, et quand on les réalise, on sent que la réalité vacille. Nos rêves maintiennent un écart entre nous et la réalité, que nous ne voulons jamais combler, car ce que nous pressentons dans leur réalisation c'est l'ennui, la peur de l'ennui. On veut se garder le meilleur pour la fin, mais le moment venu, il est trop tard.

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