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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mardi 14 décembre 2010

Un mot sur la liberté

« Telle est cette liberté humaine que tous les hommes se vantent d’avoir, et qui consiste en cela seul que les hommes sont conscients de leurs désirs et ignorants des causes qui les déterminent » - Spinoza, Ethique, III, 2, Scolie
Cette citation est une gracieuseté de Gabriel qui réfléchit sur la liberté sur son blogue et dont j'ai lu le billet ce matin.

Comme je disais dans mon commentaire à ce billet, notre «liberté» nous permet tout juste de savoir que nous ne sommes pas «libres»... Cela semble être un paradoxe, mais non. C'est la définition de «liberté» qui pose problème, l'idée est encore trop empreinte de la liberté «politique».

J'ai des instincts, je peux dire non à ceux-ci, je peux dire non à la vie, je peux de même préméditer un acte, etc. Les «instincts» ne sont pas une «non-liberté», ce ne sont pas des chaînes... ils sont ce qui me permet d'«être»...

Dire que nous ne sommes pas libres à cause de notre corps, c'est retomber dans les fausses dualités du corps et de l'esprit, etc.

Ce que Spinoza nous dit, c'est que je ne suis pas «libre», car j'ai des instincts, car j'ai un corps...

Le corps est un tombeau? Vraiment? En revanche, il est peut-être un tombeau si je REFUSE mes instincts...

Par exemple, je suis attiré par les femmes, la nature en a décidé ainsi: si je refuse de suivre mon instinct, c'est-à-dire qui est d'être attiré par les femmes, effectivement, je serai malheureux et mon corps sera comme un tombeau...

Je peux choisir entre différentes femmes, en ce sens, j'ai une «liberté de choix», mais je ne peux choisir de ne pas aimer les femmes ou d'aimer les hommes par exemple, ou les chèvres, ou peu importe...

Ce qui m'attire, c'est le corps nu d'une belle femme: c'est ma définition du «beau» en quelque sorte. Puis-je dire pourquoi je trouve ce corps «beau»? -Oui: pour ses courbes, ses formes rondes et élancées, sa fermeté, son teint, etc. Mais si nous continuons et que nous poussons un peu plus loin le questionnement: pourquoi ces formes rondes, courbes, élancées, la fermeté et le teint sont-ils de «belles choses», de belles qualités corporelles à posséder? Pourquoi un «beau» sein est-il «beau»?

C'est là qu'on se heurte aux limites du questionnement... Effectivement, nous ne sommes pas libres d'aller plus loin... Mais ce questionnement, admettons que nous croyons pouvoir le pousser jusqu'à une certaine réponse, suppose un «panlogisme», pire encore, il suppose une fin dans le questionnement, mais justement! Si le questionnement se termine, si l'on parvient à une «réponse» ultime, cette réponse ne peut constituer une réponse! Car derrière cette «raison», il doit y avoir une autre raison, et ainsi de suite, à l'infini! Bref, ce qu'on a découvert là, c'est le «principe de raison»...

Ce que nous dit le «principe de raison», c'est qu'il n'y a de réponse «ultime» à rien... Finalement, pouvons-nous dire avec Angelus Silesius : «La rose est sans pourquoi»...

Mais n'est-ce pas cela, justement, la beauté et la liberté? D'être sans «pourquoi»? Si la beauté avait un pourquoi «ultime», serait-elle encore belle? Et si la liberté avait un pourquoi «ultime», serait-elle encore la liberté?

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