Pages

«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mardi 29 mars 2011

Les obstacles «permettent» la communication..

«Pourquoi sommes-nous sur la Terre?»

Eh oui, je me demandais ça hier soir dans la cuisine vers minuit alors que j'étais saoul mort..

La question m'est venue comme ça, naturellement.. Au gré du buzz.. Alors que je lisais Habermas.. Il va sans dire que je n'ai pas pu taper mon billet..

En effet, quand on y pense, on est pas mal de monde sur la Terre..

Je veux dire qu'on est tous différents..

Il n'y a qu'à penser aux arrondissements pour commencer: quelle est la nécessité de ça? Ces divisions se font-elles naturellement? Et pourquoi a-t-on réellement l'impression quand on entre dans un autre arrondissement qu'on entre parfois aussi dans un autre «monde»?

C'est des questions ça..

Il y a des quartiers qu'on ne veut pas habiter.. Pourquoi? À cause d'un certain malaise? ou encore d'une impression de ne pas se sentir «chez-soi»?

Pourquoi les différentes nationalités sont si imperméables les unes aux autres? Par exemple, les hindous: je n'arrive pas à «comprendre» ces gens.. Ils font partie pour moi comme d'un autre monde.. On me présenterait un extra-terrestre que ce ne serait pas si différent.. Ces gens, ce pays, l'Inde, cette religion, cette histoire, cette mentalité, ces croyances, ces coutumes, ces mœurs, me sont complètement étrangers.. Pourquoi?

Ne voit-on pas l'utopie de vouloir unir toutes les nationalités sous une même bannière?

Ne voit-on pas l'irréductible singularité herméneutique des nationalités? Leur façon de se comprendre? Leur façon de nous comprendre, ou de ne pas nous comprendre, et vice-versa?

Je pourrais tout aussi bien parler de la Chine, de l'Afrique, de l'Iran, etc. Essayez-vous au swahili, au chinois ou au perse un peu, vous allez voir..

Nous faisons affaire à une originalité intrinsèque de l'espèce humaine, et dès le départ même, par les physionomies..

À une plus petite échelle aussi, immédiatement saisissable, certains quartiers ne se «comprennent» pas entre eux.. On parle pourtant de la «même» ville.. Du même territoire, mais délimité de différentes façons.. Or, ce ne sont pas les délimitations qui constituent les obstacles à la «communication».. Si les délimitations, les limites, les frontières sont là, c'est parce qu'il y a d'abord une différence, une singularité qui se traduit en frontières..

Il serait alors illusoire de penser qu'en abolissant les frontières, les obstacles, les limites, les délimitations, les territoires, on «unifierait» le tout..

Si les gens étaient tous pareils, ce serait là une terrible catastrophe..

Le «même» a besoin de l'«autre» autant pour rester le même que pour s'enrichir et devenir «autre» au contact de l'autre.. De toute façon, on ne peut jamais être «identique» à soi.. on est toujours «étranger» pour soi.. On ne se connaît jamais «totalement».. on ne peut jamais faire le tour de soi pour la simple et bonne raison qu'on s'invente à chaque instant.. Je ne peux sortir de moi, m'observer de l'extérieur comme une chose et dire je suis cela et rien d'autre car je n'aurais jamais qu'un corps sans dimensions temporelles devant moi.. donc, un simple assemblage d'os, de tissus et de «particularités fixes»..

Donc, l'«incompréhensible» (ou l'«inusité») est nécessaire dans ce monde.. et je dirais même qu'il est nécessaire à sa vitalité..

La diversité des «modes de vie» est probablement aussi nécessaire pour des raisons de survie et de vision plus «englobante» des choses qui permettent de considérer ce monde sous différents angles..

Il serait nécessaire alors de parler d'une «pluralité de mondes» plutôt que d'un seul monde unique..

Dans une seule ville, nous vivons déjà dans des mondes différents.. Parfois même dans une seule famille dont les membres ne se comprennent pas entre eux ou sont si radicalement différents...

Bien sûr, nous sommes aussi tous «pareils» par certains côtés, mais bon..

On en parlera une autre fois..

Allez, au revoir..

«Tous les peuples ont besoin d'immigrés et du rapport d'altérité posé par l'intermédiaire de leur venue. J'affirme même que la vitalité d'un peuple correspond à sa capacité d'être lui-même engagé dans toutes ses composantes dans un devenir immigré.
Nous avons tous à devenir des immigrés, à refuser une uniformité génératrice d'angoisse et d'impuissance générales. En France, nous avons beaucoup à apprendre de la façon dont les immigrés reconstituent leur culture, la réinventent.»
Félix Guattari, Les années d'hiver 1980-1985, p.60-1

Aucun commentaire:

Publier un commentaire