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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mercredi 28 avril 2010

Parler de soi

J'ai eu le malheur d'écouter Girls Boys de Pierre Nadeau hier soir, et je l'ai encore dans tête alors que j'écris ce message, tabarnak...

Essayons de se changer les idées.

J'ai oublié de noter une pensée de Leopardi qui m'avait causé une surprise il y a quelques semaines. C'était à propos de l'éloquence et du fait de parler de soi.

«Car je soutiendrai toujours qu'en parlant d'eux-mêmes, les grands hommes parviennent à se dépasser et les hommes quelconques à devenir quelqu'un. En effet, il s'agit d'un domaine où les passions, l'intérêt, la profonde connaissance, etc., ne laissent pas de place à l'affectation, à la sophistication, etc., c'est-à-dire à ce qui corrompt au plus haut point l'éloquence et la poésie; en effet, on ne peut se contenter de lieux communs lorsqu'on parle de soi : ce sont la nature et le coeur qui dictent nos propos, et l'on parle avec inspiration, plénitude, passion. Ainsi, quand on dit qu'il est utile aux écrivains de traiter de sujets d'actualité, on devrait dire qu'il leur est plus utile encore de parler d'eux-mêmes, même si parler de soi ne semble pas à première vue intéresser les auditeurs, mais il n'en est rienZibaldone, Leopardi, p.29-30 (passage souligné par moi-même)

On entend tellement souvent dire que parler de soi est une mauvaise chose, que ce n'est pas intéressant, que c'est ennuyant, que ça ne nous concerne pas, etc., que je me devais d'apporter un point de vue contraire. À mon avis, si le fait de parler de soi est tellement mal vu, c'est parce que c'est du subjectif, et qu'en notre époque scientiste, seule l'«objectivité» a droit de cité. À tout le moins, l'on exige le semblant d'objectivité des journalistes pour nos informations quotidiennes, et l'on voudrait que tout le reste soit ainsi, jusque dans les blogues. Mais l'on ne voit pas ce que tout cela nous dit : le sujet est complètement discrédité au départ, hors-circuit. La personne, l'individu, ne vaut plus rien. Ne serait-ce pas une des sources de l'aliénation, du fait que nous nous sentons étrangers au monde, étrangers à la société?

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