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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

dimanche 29 novembre 2009

Les semaines minérales

Je suis là à attendre dans le parc, il est encore trop tôt, je m'assoie à une table en métal, le vent de novembre, une lumière froide, me rappelle d'autres moments, une autre vie, lorsque j'étais enfant. J'essaie de lire ma page de L'être et le néant, le vent bouscule les feuilles et mord mes mains. Un papa accompagne sa petite fille dans les glissades, ils sont seuls, là, par ce froid, si tôt, qu'est-ce qu'ils font là? Je suis elle, je suis bambin. Souvenir de photos usées, ma mère, le froid de l'hiver approchant. Je poursuis ma lecture, bruit permanent de la circulation, l'autoroute est tout près, j'enfile mes écouteurs, musique ennuyante. Tout est fade, tout est plat, lumière froide. Il n'y a aucune issue, je régresse, l'impression de déjà vu. Je quitte le parc, pétrifié, et cherche un refuge en attendant. Tiens, le casse-croûte, en haut. Je marche dans le passé. Cette rue ne peut pas être réelle. Je suis passé. Je suis près de mourir, je suis mort. Je suis vieux, très vieux. Nouveau-né, j'arrive au monde, c'est l'automne, il fait froid, encore plus froid, c'est la survie. Je vie pour survivre. Cette lumière froide me suit partout. C'est ma vie, cette lumière, je la déteste, je l'aime, je l'aime de l'avoir tant détesté. Enfin, ce sont les semaines minérales. Je ne pense à rien. J'attends. Que quelqu'un passe. Que quelque chose passe. Que le mal passe... Que je passe, et continue mon chemin seul sur cette rue parsemée de feuilles mortes, le livre sous le bras, les poings bien serrés dans les poches, une rue qui ne mène nulle part et qui sera bientôt enneigée. Je m'attendais, là-bas, mais tout avait disparu. Ce ne fut donc que cela. Ma vie. Le souvenir d'une disparition...

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