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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

vendredi 11 décembre 2009

Croire : la disposition à servir chez l'homme

L'«estime sur parole», voilà un grand problème. Certaines personnes confient tout leur argent, tout ce qu'elles ont gagné durement et chèrement au cours d'une vie à un groupe de soi-disant investisseurs sur recommandation d'un ami, ou tout simplement parce qu'elles font confiance après s'être informées quelque peu. Les gens sont naïfs, c'est la condition première de l'homme, jusqu'à ce qu'il mange un bon coup de masse sur la gueule... S'il est chanceux, il se réveillera de sa naïveté sur tous les plans, sinon, il continuera à se faire abuser de d'autres façons. Ce à quoi je veux en venir, bien sûr, on ne parle que d'argent là, mais ça fait très mal quand même, à l'égo, de s'être fait rouler aussi facilement, au portefeuille aussi, mais ça fait mal surtout en termes de perte d'une vie de labeur, et ensuite d'être obligé de retourner travailler alors qu'on n'en a plus l'envie ni  la force. Alors, ce à quoi je veux en venir, c'est que s'il est facile pour bien des personnes de confier à un tiers le travail de toute une vie sans véritable garantie ou enquête, il est encore plus facile pour presque tous de confier sa cervelle et la direction de sa vie dans tous ses aspects au premier venu. Je m'explique, et là-dessus, j'ai un très beau proverbe très approprié que j'aime beaucoup d'ailleurs et qu'il m'arrive souvent de me réciter mentalement pour vérifier si j'ai vraiment réfléchi dans telle situation donnée : «Il est plus facile à un homme de mourir que de penser.» Et là je pense immédiatement à cette mère qui, après avoir reçu la dépouille de son fils mort en tant que soldat en Afghanistan, a dit tout en pleurant, à ma grande stupéfaction, mais au bénéfice de mon réalisme : «Mon Dieu qu'il était naïf.» Oui, il était naïf de croire qu'il allait sauver l'humanité là-bas, alors que tout ce qu'il faisait, c'était d'aller défendre les intérêts de grands conglomérats commerciaux, etc., et cette belle naïveté, ça lui aura coûté la vie. Cette belle naïveté qui l'empêchait, au fond, de penser...

«Confier sa cervelle et la direction de sa vie dans tous ses aspects», et à crédit : les croyances religieuses. Ils arrivent, ces grands représentants de la sagesse, de la divinité, de la sainteté, etc., qui sont le plus souvent des abuseurs sexuels  tapis comme des araignées dans leur coin de toile, et vous demandent sans aucune impudence non seulement de l'argent, mais la direction de votre conscience, et vous acquiescez poliment à ces boniments... Vous ne vous donnez pas la peine de creuser davantage ce qui aura un impact considérable et définitif sur toute votre vie, vos valeurs, etc. Vous naissez dans un pays musulman, vous devenez musulman; vous naissez dans un pays catholique, vous devenez catholique; vous naissez dans un pays évolutionniste ou nihiliste, vous devenez évolutionniste ou nihiliste, etc. Vous ne faites toujours que suivre...

Est-il possible de dire, une fois pour toutes : «Je doute et je suspends mon jugement sur la valeur totale de la vie»? Parce que je n'en sais rien au fond, et les soi-disant «détenteurs de la vérité» devant vous qui prétendent en connaître davantage, n'en savent pas plus que n'importe qui. Ce ne sont que des mortels comme vous, et personne n'est jamais revenu de la mort pour nous dire ce qu'il y avait de l'autre côté, si même il y a quelque chose. Je me dis que je n'ai aucun souvenir d'avant ma naissance, ni aucune impression de temps, et je ne me souviens même pas d'avoir voyagé avec les esprits : ça sera pareil quand je serai mort : il n'y aura rien. Vous répondrez : «Je suis unique, tout sera perdu!» Et je réplique : «Tu vois cette branche d'arbre? Nous sommes d'accord pour dire qu'elle est unique, autant que ce grain de sable que voici, si on l'examine bien, mais ça ne les empêche pas tous les deux d'être banals...» Oui, tu es banal comme les étoiles! Mais tout cela ne m'empêche pas de bien agir, d'être bon avec les autres, avec moi-même, et de trouver la vie belle, même si la Terre me semble parfois peuplée d'idiots. Cyrulnik appelle ça, je crois, la «résilience».


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