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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

lundi 9 novembre 2015

Sur le mépris

Laissons les poules
dans le poulailler
Il est toujours extrêmement périlleux de mépriser quelqu'un. Le mot le dit: mépriser, c'est se «méprendre», c'est-à-dire, prendre quelqu'un pour un autre.

Le mépris n'a pas sa place en aucune circonstance, parce que si la personne n'est pas à la hauteur de ce qu'on pensait d'elle, à quoi bon la mépriser en plus? Vaut mieux en avoir pitié, si on a un cœur.

Et si elle est davantage que ce qu'on croit, c'est dangereux.

Une chance que nous ne sommes pas en Russie, parce que tous les animateurs de télé et de radio qui ont méprisé allègrement et quotidiennement Justin Trudeau durant toute sa vie seraient présentement dans un bloc cellulaire glauque en train de manger littéralement leur couilles comme entrée.

Qu'est-ce qui fait que les gens méprisent si facilement? pourquoi sont-ils si méchants? si bas?

Moi-même j'ai été sous-estimé toute ma vie. Tout simplement parce que je n'ai pas l'air de ce que je suis. Quand j'ai quitté le métier de soudeur et que je me suis mis à étudier en philosophie à l'université, j'ai rencontré un ancien collègue soudeur sur la rue. Quand je lui ai expliqué ce que je faisais dorénavant, il m'a dit: «T'as pas l'air d'un philosophe».

Non, je n'ai pas l'air d'un philosophe... Pourquoi? Parce que je n'ai pas les sourcils de Languirand? Parce que je n'ai pas de longue barbe? que je ne fume pas une pipe?

Je ne savais pas quoi dire à cette remarque, j'ai juste dit: «Ouais, c'est vrai». Qu'est-ce que j'aurais pu dire d'autre? Des fois c'est tellement bête, qu'il n'y a rien à faire.

Dernièrement, un vieux monsieur a visité ma bibliothèque de livres de philosophie, j'en ai vraiment beaucoup. La première chose qu'il a dit c'est: «À quoi ça sert la philosophie?» Je ne savais pas quoi dire, alors je lui ai dit n'importe quoi: je lui ai dit que ça servait à penser. J'étais fâché, parce que je venais de lui dire que cette bibliothèque m'avait coûté 35 000$ et que ça m'avait pris 7 ans pour la construire... Se faire demander alors à quoi tout ça ça sert, c'est insultant un peu.

En tous cas, c'en est un ça que j'ai eu de la difficulté à ne pas mépriser...

Mais je me dis au fond, que c'est son problème si ce monsieur ne sait pas à quoi sert la philosophie. Il lui manque quelque chose dans la vie, il lui manque le meilleur selon moi.

Il me fait pitié.

Car je connais la valeur de la philosophie, et je n'ai même pas à la défendre.

Je n'ai aucune envie de convaincre quelqu'un que la philosophie sert à quelque chose.

Avant, ce genre de choses m'enrageaient, mais plus maintenant: ça me laisse plutôt indifférent, au pire, ça me fait rire un peu. À vrai dire, je pense même que je n'en ai rien à foutre finalement. Je suis tellement bien dans ce que je fais, j'aime tellement lire mes livres de philosophie, que je pourrais faire complètement abstraction du monde extérieur. Je n'ai plus rien à prouver à personne.

Que les gens croient ce qu'ils veulent, qu'ils fassent ce qu'ils veulent, moi je suis bien dans ce que je fais et je ne vais pas me lever en tant que chevalier de la vertu pour changer le monde.

Comme je l'ai déjà dit, vouloir changer le monde ce serait vouloir changer des poules en chevaux de course. C'est mission impossible.

Laissons les poules dans le poulailler, il y a d'autres choses à faire de mieux.

Est-ce que mon propos sentirait un peu le mépris?

Non, il sent la philosophie.

6 commentaires:

  1. La philosophie c ' est un fruit magnifique dont on enlève l ' écorce en retenant son souffle et quand il apparaît dans toute sa splendeur on n ' a plus qu ' à mordre dedans , quel délice !

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  2. J'ai moi aussi étudié en philosophie et on m'a fait les mêmes remarques. Pourquoi Péladeau père et fils ont-ils étudié en philosophie? Pourquoi Aristote était le précepteur de Alexandre le Grand? Pourquoi Sénèque enseignait à Néron? Pourquoi cette philosophie qui ne vaut prétendument rien est la récréation des riches et des puissants tout autant qu'elle est la consolation des pauvres et des misérables? Ceux qui ne voient pas l'importance de la philosophie sont ni riches, ni puissants, ni pauvres, ni misérables et font malheureusement partie de ces hordes de tièdes qui n'intéressent ni le ciel ni l'enfer.

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  3. Ceux qui sont indifférents à la philosophie me causent toujours un étonnement philosophique.

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  4. @GaétanBouchard
    " Pourquoi cette philosophie qui ne vaut prétendument rien est la récréation des riches et des puissants " -
    La philosophie n ' est pas et ne sera jamais la récréation des riches - Ils/elles n ' y comprendront jamais rien -
    Faire semblant de s ' y intéresser est leur prétexte faux pour essayer de faire croire qu ' ils s ' interessent aux autres alors qu ' ils les haïssent -
    Et on voudrait essayer que nous nous intéressions aux riches ?? à d ' autres !!
    Personne ne me prendra à cette haine avérée !!
    La haine ne fait pas partie de mon monde -

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  5. @monde indien: Moi aussi je crois que les riches ne s'y intéressent pas vraiment, en tout cas, ils ne s'y intéressent pas pour elle-même, mais peut-être en espérant obtenir plus de pouvoir par elle. Après ils se rendent compte qu'ils se sont trompés sur son compte, et ils la laissent.

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  6. Le riche a besoin d'un fou du roi, quelqu'un qui le ramène sur terre. Quoi de mieux qu'un philosophe un peu pouilleux pour se faire dire ses quatre vérités?

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