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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

samedi 11 juin 2011

21. La voix en tant qu'obstacle à la communication..

Je sais que cela peut inutilement paraître paradoxal, mais c'est ce que j'ai découvert hier soir alors que je faisais du «pillow talking» avec ma blonde..

Nous discutions de choses importantes et je devais pouvoir expliquer ce que je ressentais, mon état intérieur, etc., or, j'en étais complètement incapable dès l'instant où j'enlevais mes bouchons (j'en porte tout le temps pour dormir) pour mieux entendre ma voix..

Ce que je ressentais alors que je les enlevais: une sorte de rétroaction se manifestait immédiatement, de sorte que je devenais concentré sur ma voix, sur son ton, son effet, et non plus sur ce que j'avais vraiment à dire, sur ce que je ressentais..

On aurait dit alors que la discussion tombait au niveau des propos banals et quotidiens sans aucun sens véritable, au pire, une sorte de bavardage formalisé, «acceptable», mais qui aboutit toujours à un cul-de-sac.. C'est pour cela aussi, entre autres, que je crois que les paroles des gens à la «belle voix» sont le plus souvent absolument vides de sens..

Dès que je pouvais ravoir une «distance» par rapport à ma voix, je pouvais redevenir moi-même et m'exprimer beaucoup mieux.. Étrange.. Comme si l'identité que me confère ma voix était une «fausse identité», ou une identité interférant avec mon identité véritable qui se cache constamment, qui est difficile à découvrir, à faire parler.. Comme si celle-ci se terrait quelque part en moi, derrière les mauvais souvenirs d'un moi en morceaux..

C'est aussi la raison pour laquelle je n'ai jamais vraiment eu l'impression de pouvoir communiquer quelque chose d'important, de «valable», par la parole, la discussion..

Toute une série de facteurs nous empêche de «réellement» communiquer, alors que nous jacassons à profusion et sommes inondés par les flots de paroles..

La bouche parle mais ne «parle» pas: elle construit un beau monologue où elle s'admire elle-même en train de parler.. Elle dit ce qu'il «faut dire», ce qu'il «y a à dire», selon les circonstances.. Elle le contexte présent, la surface, mais rarement ce qu'il y a en dessous.. Elle se perd dans la «forme» et en oublie complètement le contenu, et c'est plus fort qu'elle: la voix «extérieure» assourdit la voix «intérieure»..

C'est presque sa mission que de «rien dire», que d'occulter le «vrai»..

La voix en tant qu'«arme de superficialité» pour protéger l'intérieur ou le soi..

La voix en tant qu'«anesthésie» du social, de l'individu, des émotions réelles..

Parler pour s'éloigner de soi-même le plus possible, pour se tromper sur son compte et tromper les autres..

La voix du «On»? -Non. En tout cas, pas seulement ça.. ce serait trop facile de penser cela «à la Heidegger» et de s'en débarrasser sous un pseudo-jargon de formules théoriques..

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