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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

vendredi 2 avril 2021

Pour ou contre la peine de mort?

J'ai écrit récemment que j'étais pour la peine de mort. C'est peut-être une preuve que je commence à démontrer des signes de sénilité.

Je me suis beaucoup plus souvent, à mon souvenir, prononcé contre la peine de mort que pour dans ma vie.

Je sais que j'ai apporté dernièrement, dans ma justification pour la peine de mort, l'argument qu'il était important de rendre justice aux familles des victimes en exécutant le coupable... Le problème avec cet argument, et avec les arguments en général pour ou contre la peine de mort, c'est qu'ils reposent en grande partie sur les émotions, et on le sait, les émotions sont changeantes.

Dire que toutes les personnes coupables de meurtre doivent être à leur tour mises à mort, c'est dire implicitement que le système ne se trompe JAMAIS, et que nous avons véritablement devant nous le coupable. Or, nous savons qu'il y a déjà eu des condamnés à mort qui étaient innocents... Donc, etc.

Dans l'argument que j'avais avancé, je mettais en avant le fait que l'exécution du coupable représenterait un soulagement pour la famille... Cependant, il y a plusieurs objections à cela.

Premièrement, il se peut qu'il y ait eu erreur sur la personne.

Deuxièmement, certaines personnes proches de la ou des victimes peuvent ne pas être d'accord pour que le coupable paie son geste de sa vie.

Troisièmement, la personne coupable peut souffrir d'une maladie mentale qu'on ne connaît pas encore, ou qu'on ne connaît pas bien.

Quatrièmement, le coupable peut se réhabiliter complètement.

Cinquièmement, et c'est peut-être l'objection la plus importante, SI la personne qu'on tient pour coupable ne l'est pas, et qu'on l'exécute, et qu'on se rend compte de l'erreur par la suite, nous avons alors fait un très grand dommage, et je peux facilement imaginer l'effet terrible sur la famille d'avoir en quelque sorte participé au meurtre d'une personne innocente de plus... pendant que le véritable coupable continue de rôder à l'extérieur.

Et je pourrais ajouter encore plusieurs autres objections.

Le «œil pour œil, dent pour dent», est pourtant une réaction naturelle... Et c'est souvent une règle qui marche et dissuade dans la vie de tous les jours dans des questions autres que le meurtre, par exemple.

On ne peut donc pas abolir cette règle en disant qu'elle n'est pas bonne.

De même, il n'y a pas de règle absolue contre la mort d'une autre personne, qui serait de plus, «coupable».

Dans tous les cas, que ce soit pour ou contre, il n'y a pas de règle absolue, mais seulement un équilibre de raisons. C'est pourquoi il est si difficile parfois de trancher sur ce sujet comme sur d'autres, tel l'avortement par exemple, etc.

Dans un contexte «révolutionnaire» par contre, la peine de mort pourrait devenir courante et banale, comme on l'a vu dans l'histoire de la Révolution française, du régime nazi, de la révolution bolchevique, etc. Dans ce contexte bien précis, il est normal de voir ses opposants comme des ennemis politiques mortels, qu'il faut attraper rapidement, enfermer, et exécuter, possiblement après les avoir torturés pour recueillir le maximum de renseignements possibles sur d'autres ennemis potentiels. Tout cela semble logique et rationnel afin de conserver le pouvoir, et je ne crois pas que les rois aient jamais fait autrement non plus. Cette façon de faire a toujours existé à divers degré. Il n'y a qu'à étudier un peu le colonialisme pour voir que c'est encore le cas.

Il n'y a donc pas de règle qui vaudrait dans tous les contextes contre la mort d'une autre personne. La vie, dans l'histoire, n'a jamais été une valeur absolue, et ne le sera probablement jamais.

Il n'y a qu'à penser ici au rapport entre les bienfaits et les méfaits d'un médicament: si la vie était une valeur absolue, et qu'il y avait un risque même minime de décès avec un nouveau médicament, on ne pourrait jamais l'utiliser. Or, nous savons aujourd'hui que tous les médicaments comportent des risques pour la vie, et nous les utilisons quand même, donc la vie n'est pas pour nous non plus une valeur absolue.

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