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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

vendredi 31 mars 2017

Ricard - Plaidoyer pour l'altruisme

J'ai commencé ce livre il y a quelque temps, qui est assez bon, sûrement utile, parfois critiquable. Je vais en continuer la lecture avec plaisir, mais cela dit, c'est alterné avec beaucoup d'autres livres à la fois.

Cependant, j'ai relevé ce qui me semble être une erreur importante. Ricard écrit que Hobbes est le promoteur de l'égoïsme universel, avec son l'«homme est un loup pour l'homme». Alors je me suis mis à la lecture de ce philosophe, et j'ai découvert un très bon livre, le Léviathan, que je suis d'ailleurs en train de lire en parallèle.

L'erreur la voici, on trouve la réponse dans la correspondance de Hobbes: «À coup sûr, l'une et l'autre formule sont vraies, qui déclarent: l'une, que l'homme est un Dieu pour l'homme, l'autre, que l'homme est un loup pour l'homme. Celle-là est vraie si l'on considère les concitoyens entre eux, celle-ci si l'on considère les cités.»

En passant, la locution Homo homini lupus est, qui a une longue histoire de reprise et de réinterprétation, proviendrait d'une pièce de Plaute «La Comédie des Ânes», vers 195 av. J.-C. De plus, ce rendu de la locution est déjà erroné, puisque la voici complétée: «Quand on ne le connaît pas, l'homme est un loup pour l'homme»: ce qui signifie simplement que «l'homme prend pour un loup l'homme qu'il ne connait pas. Plaute vise la peur de l'inconnu et non la violence des humains». (Wikipédia, Homo homini lupus est)

Donc, l'erreur est double: ni Plaute ni Hobbes n'ont dit cela dans le sens suggéré par Ricard.

6 commentaires:

  1. Point de vue intéressant à développer d'autant plus que tout le monde commet cette erreur.

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  2. Les choses qu'on pense «bien connaître», parce que tout le monde les colporte, ne sont souvent que préjugés. La connaissance demande du temps, luxe qu'on n'a pas aujourd'hui: et c'est la véritable richesse. Paradoxalement à l'ère des machines, on a moins de temps qu'auparavant: ce qui est bien la preuve que ce ne sont pas les machines qui nous servent, mais que nous sommes leurs esclaves, elles sont nos nouveaux maîtres, en plus impitoyables.

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  3. Autre paradoxalité du jourd'hui: on peut être ennemi d'Internet, mais il faut passer par lui pour le dire! Saloperie de technologie!

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  4. Nous avons oublié que tout ce que l'homme travaille de ses mains lui transfère une partie de sa divinité, de ce qui est sacré en lui. C'est pourquoi Craig Thompson dans la bande dessinée autobiographique «Blankets» peut dire de la douillette qui lui est offerte par sa nouvelle petite amie qu'elle est «sacrée». Effectivement elle l'est, puisqu'elle a été faite de ses mains, qui ont transféré à ce tissu sa sacralité.

    Or, aujourd'hui notre problème, c'est que nous n'avons plus de contact directement avec les choses, il n'y a donc plus rien de sacré. Pour qu'il y ait du sacré, il faut qu'il y ait minimalement un transfert direct d'un être humain à un autre, mais nous vivons dans le virtuel... nous perdons alors: tout.

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  5. Je viens de tomber sur une citation intéressante de Ellul qui fait, par contre, penser la sacralité dans un sens négatif: «Ce n’est pas la technique qui nous asservit mais le sacré transféré à la technique. Ce n'est pas l'État qui nous asservit, c'est sa transfiguration sacrale.»

    À mon avis, il ne sert de rien d'insister sur ce sens, puisque le religieux part effectivement d'une expérience première et fondamentale du sacré, et on a beau jeu de dire par la suite que la religion n'est pas bonne, il reste que l'expérience du sacré est toujours présente et bien réelle: elle précède les religions.

    Et c'est pourquoi les religions sont coriaces: parce que leur noyau est véritable, mais ce qu'il y a autour est variable et relatif au contexte, contexte qui n'est plus le nôtre aujourd'hui.

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  6. Pour combattre l'anxiété, rien de mieux que d'avoir accès à la nature. Mais elle est où, la nature, pour quelqu'un qui ne sait pas différencier une fraise sauvage d'un bonbon synthétique?

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