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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

dimanche 26 novembre 2023

Je ne sais plus trop comment parler de moi-même. Je sais que je suis un être multiforme, jamais pareil, mon esprit n'est pas stable, et pourtant je suis reconnaissable, je me reconnais moi-même à chaque instant. Oui, je me reconnais, même quand je ne me reconnais pas, quand je suis l'ombre de moi-même, comme ces derniers jours. La douleur physique, l'anxiété, les palpitations, les engourdissements, la torture mentale. Évidemment, j'aimerais bien revenir à mes 20 ans, quand j'étais totalement insconcient de la vie de la mort et que je me foutais de tout. L'infini ne me foutait pas la chienne comme aujourd'hui. On dirait que je ne réalisais pas. Je fumais de l'herbe, et ça me faisait drôle, et c'est tout. Aujourd'hui quand je bois ou fume, je tombe dans une sorte de transe de l'épouvante. On dirait que ça m'enlève un bouchon, une barrière de sécurité, et que je me retrouve face à la vérité nue, sans protection, sans voile, sans possibilité de retour. Je ne sais pas pourquoi ça a changé à ce point, je ne sais pas quand a eu lieu la transition. Je suis très conscient aujourd'hui que rien ne peux me sauver de mon dernier souffle, car oui, il y en aura un dernier, et c'est cette certitude qui me fait peur, comme si j'y étais déjà. Je ne veux pas quitter mon chien, mes livres, mon moi, ma blonde, mes choses, ma vie, mon histoire, la terre. Je n'ai aucune garantie d'aucun ordre sur ce qu'il y a après. Mais étonnammment, il n'y avait rien avant que je naisse, et maintenent, pourtant, il y a quelque chose. Est-ce une illusion? Ça ne sert à rien de miser là-dessus, je suis là, je vis, je souffre, j'ai conscience que mes morceaux partent les uns après les autres, ça me fait mal, même si c'était une illusion, ça ne changerait rien à l'affaire.

J'ai cru longtemps que tout le monde était potentiellement bisexuel, et je voulais le croire pour moi-même aussi. Je peux dire aujourd'hui avec une certain embarras que j'étais vraiment innocent de croire ça. Je le sais dans ma tête que lorsque je fantasme sur du sexe chaud torride et intense et que le coeur me débat, c'est à des femmes que je pense. Ça vient tout seul dans ma tête et ça m'inonde comme une vague qui me submerge. Les voix dans le genre de celle de Grimes me transportent dans des fantasmes vraiment chauds, je rêve à des corps minces, à des seins, à des formes féminines, à une sorte de douceur infinie et féline de femme. J'imagine des chattes, des ventres plats couchés, des mouvements lents graçieux, une sorte d'envoûtement, je deviens distrait, je suis dans mon monde chaud de fantasme érotique, et la femme en est l'essence sublime. Tout mon corps est transporté en elle ainsi que mon esprit. Qu'avais-je à m'imaginer pouvoir aimer les formes carrées du mâle et les queues? C'était stupidité de ma part, manque de connaissance de soi. Bien sûr, je peux m'imaginer dans des fantasmes homosexuels, mais ça ne me remplit pas de transe érotique, c'est comme de la mécanique. J'ai essayé, ça ne m'a pas accroché. J'ai fini par comprendre, mais très longtemps après dans ma vie. J'avais la volonté forte de croire que nous étions tous pareil au niveau sexuel, mais non, nous sommes tous très différents, et tant mieux. Pourquoi avais-je cette volonté, cet idéal de croire à cette absurdité? Vaut mieux que je ne me questionne pas trop là-dessus, parce que trouver la réponse pourrait être long. Ce qui compte, ce sont les certitudes que j'ai maintenant, et qui, on peut dire, ont été très bien testées. C'était ma volonté de toute façon de tout essayer, de tout tester par moi-même. La vérité parle fort, mais nos conceptions farfelues les enterrent. Les gens ne cherchent la plupart du temps qu'à confirmer ce qu'ils croient déjà, et ils sont prêts à s'aveugler sur tout pour y parvenir, et c'est l'erreur du monde depuis toujours.

La forme qu'a pris mon blog a beaucoup changé. C'est peut-être normal après avoir survécu à trois attaques nucléaires. Les circonstances de la vie m'ont bousculé, et j'ai envie de m'en plaindre. Mais en même temps, je n'en serais pas là aujourd'hui, et je n'estime pas inutile d'avoir été détruit partiellement. J'ai survécu, oui, il faut le dire. Mais je l'oublis souvent. Je suis habité par une sorte de désolation. Je demande des choses au monde, à Dieu, à Jésus, à Frère André, mais je ne sais pas si on m'entend vraiment. Je veux y croire. Si seulement je pouvais avoir une réponse claire en retour! Mais non, je n'ai aucune certitude jusqu'à maintenant. Je n'arrive pas à comprendre le monde, le but de la vie me paraît toujours plus mystérieux. Je ne sais pas pourquoi je suis là, nous sommes là, et ça me tue à petit feu.

Je ne comprends pas le sens de la vie, et c'est terrible. Il n'y a aucune réponse pour moi. Je me retrouve avec un trou béant dans la trame de mon histoire, de ma vie. Le sens de la vie est une faillite, un mur. Les gens n'ont pas conscience que jusqu'à preuve du contraire, c'est la dernière fois qu'ils vivent, chaque jour de leur vie, et qu'il n'y a rien après. Leur vie leur coule des mains sans qu'ils n'y puissent rien pour la stopper. Mais non, personne ne semble concerné par sa propre mort, personne ne s'en inquiète trop. On se figure toujours la mort comme la mort des autres. On s'imagine comme dans un spectacle, mais on n'imagine jamais la fin de l'imagination et du spectacle. Et si c'était ça finalement, qu'il n'y a plus rien après la mort? C'est une possibilité très concrète. Notre essence est-elle d'appartenir au monde des esprits, notre corps ne pouvant se sauver lui-même? Et les esprits dans tout cela ne peuvent se maintenir que par les vivants, car c'est nous qui les faisons vivre.

Avant je trouvais beau le ciel l'infinité des étoiles, maintenant il me fait parfois peur. Je me dis que ce ciel n'est pas moi, qu'il n'a aucun rapport avec moi, pourtant je suis définitivement dedans et pour la vie, et pour toujours. C'est drôle à dire, et je n'aurais pu le dire avant, mais je suis «enfermé» dans l'infini pour l'éternité, que je sois vivant ou mort. Je suis dans cette chose sans nom, inconcevable, inimaginable, incompréhensible. Que signifie notre volonté de tout connaître par rapport à cet abîme sans fond?

Le monde semble évoluer irrésistiblement, comme si c'était inscrit dans son essence, dans son plan, vers une mutation importante. Il est possible que l'être humain comme tel disparaisse complètement un jour. Et je ne comprends pas cette logique si elle est inscrite en l'homme. Quand je regarde la femme, je ne comprends pas comment elle pourrait être plus parfaite, ni la nature non plus. Tout participe déjà d'une beauté sublime, comment la vocation de l'homme pourrait-elle être de se tranformer à la fin en monstre? Nous pouvons vouloir dépasser la nature, mais il est important de constater, et s'il est impossible de le faire, de croire, qu'elle est parfaite. Nous sommes l'oeuvre de l'Infini, et il m'arrive de croire que toutes les particules de mon corps et de mon esprit sont liées à l'univers entier, à l'incommensurable, au mystère du monde. Ce que je suis a un effet sur le monde qui a un effet sur moi en retour, car mes particules sont intriquées à lui, je suis le monde, il est moi. J'ai l'impression parfois que ce que je pense se réalise au niveau mondial. J'agis par devant, mais j'agis encore davantage par derrière d'une façon cachée à moi-même. Il faut croire que tout est possible.

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