Pages

«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

lundi 2 mai 2022

Vibrer

Étonnamment, si on me demandait: quel est l'album préféré de ta vie? Je ne saurais que répondre, et pourtant. J'en connais qui doivent le savoir très bien, de la façon dont ils parlent de la musique. Mais pour ma part, malgré que la musique soit essentielle dans ma vie, qu'elle représente un grand plaisir et une grande inspiration, que j'en consomme en grande quantité, et depuis toujours, je ne suis pas capable, heureusement ou malheureusement, d'écouter le même album plus qu'un certain nombre de fois déterminé. Ne me demandez pas de réécouter des albums de ma vingtaine, trentaine ou quarantaine: il n'y a rien de plus ennuyant. Tous mes «excellents albums» ont toujours fini dans un coin ou aux poubelles, pour ne plus jamais être écoutés.

J'ai besoin tous les jours de découvrir de la nouvelle musique, surtout de nouveaux sons et de nouveaux styles, le plus possible originaux. J'ai un appétit de musique, comme j'ai un appétit de lecture. Je juge en un clin d'oeil si une chanson est bonne, moyenne ou mauvaise. Je suis capable de découvrir de petits chefs-d'oeuvre dans tous les genres, du classique au death metal. 

La clé est dans le concept. Une oeuvre qui va dans tous les sens est déconcertante. 

Par exemple, j'écoute parfois du death metal, et j'aime parfois le country, mais si demain Fear Factory se mettait à jouer du country, je penserais qu'ils sont devenus fous. Par contre, les albums Joshua Tree et Achtung Baby du groupe U2, bien que se suivant, sont très différents, mais des chefs-d'oeuvre dans leur genre respectif. De même pour les albums The Downward Spiral et With Teeth de Nine Inch Nails. Cependant, bien que je fasse l'éloge de ces albums, je ne peux les réécouter et rééprouver ce que j'en ai éprouvé lors des premières écoutes, car tout cela est ancré dans un monde maintenant disparu, et qui surtout, ne me parle plus.

Si un concept guide l'album, ce sera probablement un bon album. La plupart du temps, le manque d'unité dans une création artistique est dû à un manque de vision, à un manque de connexion avec l'intérieur. La diversité est possible, mais à l'intérieur de l'unité, comme s'il y avait jeu. Il faut ressentir au plus profond de soi ce que l'on veut exprimer. Il faut naître à soi-même. L'art véritable mise le tout pour le tout. L'art doit prendre place dans une histoire, un narratif, comme une basse continue, car la vie est une telle histoire, un peu sans le vouloir. La vie est art, et l'art est vie.

Lorsque j'écoute une bonne chanson, mon impression générale est qu'une nouvelle dimension s'ouvre à moi, dans laquelle j'entre, et dans laquelle je suis touché. Cette chanson créée en moi des émotions, et je l'investis à mon tour d'émotions, comme si j'avais une émotion d'émotion. On est joyeux d'être joyeux, et triste d'être triste. Mais il est aussi possible d'être joyeux d'être triste, et triste d'être joyeux, comme la femme tout juste laissée se trouvant à une fête peut y être joyeuse et triste à la fois, sa tristesse édifiant sa joie, sa joie creusant sa tristesse, joyeuse mais triste de n'y pouvoir l'être, à jamais, avec son amoureux. Nous vivons dans le temps, les émotions sont dynamiques et parfois paradoxales. 

J'écoute plusieurs fois une chanson, jusqu'à ce que se dissipe ce qu'elle me fait ressentir. Parfois, le processus peut se dérouler par intervalles sur plusieurs mois, ou même plus d'une année, mais ce qu'elle me fait ressentir se dissipe à chaque fois toujours davantage, c'est immanquable. C'est frustrant de dire un jour que c'est la «chanson de ma vie», d'en parler à tout le monde, et quelques jours après, de l'avoir oubliée, et d'être passé à autre chose... C'est la même chose pour les films.

J'ai toujours trouvé ça normal, mais ça ne l'est pas. La plupart des gens semblent n'avoir aucun problème à réécouter la même musique et revoir les mêmes films. Je ne sais pourquoi je suis ainsi, et bien que ce pourrait être un sujet d'intérêt, cela m'importe moins que de

Vibrer

Aucun commentaire:

Publier un commentaire