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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

samedi 5 juin 2010

Je suis un épais

Il y a des fois où je suis un épais, et d'autres fois où je suis brillant. C'est Jerry Lewis qui avait dit qu'on était tous des génies au moins une fois dans notre vie. Pour compléter cette affirmation par trop optimiste j'ajouterais que nous sommes aussi, au moins une fois dans notre vie, prodigieusement épais.

Je me souviens d'une ex, une des femmes que j'ai le plus aimée, un vrai petit bijou de femme d'une quarantaine d'année. Elle s'autohumiliait au téléphone en disant que c'était de sa faute, le prob qui a causé notre rupture, parce qu'elle était une épaisse... Sur le coup, ça m'a surpris, parce que c'était une femme intelligente, noble, j'aurais aimé lui dire, «ben non, c'est moi qui suis un épais...», mais je ne lui ai pas dit. Je l'ai laissée continuer à s'autohumilier... De toute façon, je me doutais bien qu'il n'y avait plus rien à faire pour sauver notre relation et qu'elle avait déjà décidé, etc., même si j'ai cru longtemps que j'avais peut-être encore une petite chance, mais à peine. Alors j'ai pas insisté, je voulais pas forcer, j'étais déjà assez abattu comme ça par notre échec amoureux, notre dérapage méditerranéen d'âmes nordiques, j'étais enseveli sous les larmes. Peu après, je suis tombé dans le néant de la dépression : quelques mois à manger de la soupe et à écouter ascétiquement l'album 100th Window de Massive Attack.

On aurait pu être deux épais ensemble. On aurait été heureux d'être épais ensemble. Mais je crois que ce qui nous rendait épais, surtout moi, c'était le fait que nous faisions une débauche d'émotions, que dis-je, une orgie d'émotions et d'émotivisme chaud alors que nous étions des types habituellement froids, et faits pour le froid. Cela nous rendait maladroits, surtout moi, qui fut un épais prodigieux dans toute cette histoire. J'ai encore honte de ça aujourd'hui, et je continue de penser que je devrais aller me cacher dans un petit coin pour le restant de mes jours tellement j'ai honte. C'est pas pour rien si je me punis des fois, que je refuse des prom, que j'échoue pour rien. Je m'en voudrai toujours d'avoir été un épais fini avec cette femme, d'avoir perdu le contrôle, ma retenue, ma froideur essentielle, et d'avoir tout gâché, comme ça, gratuitement. J'avais peur d'être heureux. J'avais peur du bonheur absolu d'être avec une femme que j'aimais trop. J'avais tellement peur que ça finisse, que j'ai précipité la fin avant que ça fasse trop mal. Elle avait trop de pouvoir sur moi. Voilà la raison, finalement, de mon épaisséité... Encore une autre excuse.

Bon. C'est tout ce que j'avais à dire à matin. M'en va déjeuner.

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