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«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mercredi 24 juin 2009

La grosse machine à viande

J'aime la viande, cependant, je sympathise avec la cause du végétarisme : dissonance cognitive en plein! Quel est l'argument principal des végétariens : que l'animal souffre et que, par conséquent, il est mauvais de manger de la viande. D'accord, dira l'industrie, mais si les conditions d'exploitation sont améliorées à un point tel que l'animal ne souffre absolument plus, à aucune phase du processus d'exploitation, quel argument vous reste-t-il? Dans ce cas, il ne vous reste plus qu'à militer pour de meilleures conditions d'exploitation de ces animaux... si la souffrance de ceux-ci est votre argument principal.

Vous pouvez aussi argumenter en disant que la viande a des conséquences néfastes sur la santé ou en essayant de prouver que l'être humain n'est pas fait pour manger de la viande, par exemple, qu'il n'a pas les dents pour la déchiqueter, etc. Je pourrais vous rétorquer que nous ne sommes pas faits pour manger des noix non plus, puisque nous nous cassons les dents dessus! Vous pourriez me répondre que nous avons des mains pour les casser, et je pourrais vous répondre à mon tour que nous avons des couteaux pour découper la viande, etc.

Je ne vois vraiment pas de moyen de convaincre quelqu'un qui aime la viande et qui veut en manger, que la viande n'est pas bonne ou que manger de la viande n'est pas une bonne chose pour telle et telle raison. Je pense que la possibilité même de cette question aujourd'hui prouve que nous vivons dans l'abondance. À une époque antérieure, la question ne se serait même pas posée. Ce qui a empêché dans l'histoire certaines personnes de manger de la viande, c'était des motivations métaphysiques ou religieuses. Que nous reste-t-il aujourd'hui comme arguments, une fois que la métaphysique et la religion ont pris le bord?

L'être humain est un omnivore. Nous consommons peut-être beaucoup plus de viande que nous devrions en consommer. Cependant, rien ne pourra m'empêcher de manger un rôti en toute bonne conscience, ou presque. Une solution serait de créer un substitut parfait de la viande, qui possède la même texture et qui serait saignant. Dans ce cas, nous n'aurions plus aucune raison de tuer des animaux. Cependant, je doute fort que cela se produise, puisque tuer un animal est beaucoup plus facile et moins couteux, surtout en recherche.

Aussi, pendant que nous prenons en pitié les animaux, nous ne nous rendons pas compte que nous-mêmes sommes exploités par le système et que, par conséquent, nous sommes nous aussi du bétail en train de passer dans une grosse machine à viande. Il est évident que nous devrions nous battre pour l'être humain en premier. Cependant, encore une fois, je pourrais alléguer que les souffrances de l'être humain ont été grandement diminuées dans le processus d'exploitation, et que par conséquent, il n'y plus aucune raison de cesser celle-ci... Est-ce que le fauve qui tue sa proie rapidement et sans douleur est justifié de lui enlever la vie? Puisqu'il le fait sans causer de souffrance?

Vous pouvez facilement voir que le fait de ne pas causer de souffrance ne justifie pas la mort, ni l'exploitation. Un médecin tordu pourrait profiter de l'anesthésie de sa patiente pour la violer, elle ne ressentira rien, ne souffrira pas et ne se souviendra de rien : est-ce que son acte est acceptable, justifié, puisqu'il ne cause aucune souffrance?

Si vous tenez à tout prix à l'intégrité physique de l'organisme, je peux vous rétorquer que nous arrachons les plantes, que nous exploitons les fruits, les légumes, qui sont eux aussi des organismes vivants... La vie se nourrit de la vie, vous ne pouvez rien y changer. Le fait, et le problème fondamental je crois, c'est notre conception de la mort. Dans ce genre de questions, la conception que nous avons de la mort est centrale. Nous croyons que la mort est absolument une mauvaise chose. Pourquoi? Franchement, je ne sais pas. Sommes-nous allés de l'autre côté pour voir ce qu'il y avait?

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